sera libre, vous irez en Angleterre ou en Espagne, ou même plus loin, et vous vous marierez ensemble.
— Et viendras-tu avec nous, toi, maman ? demanda la jeune fille.
— Certes, si vous voulez de moi.
Valentine se leva d’un mouvement plein de pétulance et fit quelques pas dans la chambre.
— Je suis bien faible ! dit-elle.
Puis s’arrêtant devant la glace qui était sur la cheminée, elle ajouta :
— Je suis bien pâle !
Puis encore, avec un frisson qui secoua ses membres, en mettant un cercle noir autour de ses yeux :
— Maurice est peut-être plus pâle que moi !
Elle revint s’asseoir, mais au lieu de s’appuyer désormais au dossier du fauteuil, elle mit sa tête sur l’épaule de la veuve, de façon à ce que son visage fût masqué pour un regard venant de l’alcôve.
— Je vais dormir ainsi, dit-elle, veux-tu ?
— Je veux bien, répondit la veuve, qui reprenait quelque sang-froid et entrait peu à peu dans son rôle, mais pourquoi ne pas te remettre au lit ?
— Ceci est bien, murmura Valentine très bas, continue.
Elle ajouta tout haut :
— Parce que je suis mieux comme cela ; il me semble que tu me gardes.
— Tu as donc peur, chérie ?
— Quelquefois, oui… je revois mon frère… Oh ! comme je l’aurais aimé !… et mon père… tous deux livides, tous deux morts… J’ai sommeil, bonsoir !