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Page:Féval - Maman Léo, 1869.djvu/163

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parce que Coyatier était fait comme elle.

Les Habits-Noirs, si redoutables qu’elle les vît dans les brouillards de sa pensée, menaçaient surtout son imagination ; ils tuaient par la ruse et de loin ; leurs mains blanches, qu’elle venait de voir, répugnaient à la besogne rouge.

Coyatier, au contraire, en fait de crime, était un manœuvre et travaillait de ses bras.

Les autres pouvaient passer pour les juges prononçant l’arrêt ; Coyatier était le bourreau, Coyatier était le couteau.

Les jambes de maman Léo, pour la première fois de sa vie peut-être, flageolèrent franchement sous le poids de son robuste corps.

Quand le Marchef eut monté une douzaine de pas, il se retourna, et voyant que la veuve restait immobile comme une borne, il dit :

— Allons-nous coucher ici ?

Maman Léo se mit à marcher vers lui péniblement.

En voyant sa répugnance, le Marchef ajouta avec un gros rire qui sonnait d’une façon lugubre :

— On ne vous mangera pas, la vieille !

Il reprit sa route. Maman Léo le suivait de loin. En tournant l’angle de la maison de santé, elle reconnut le coupé qui l’avait amenée, stationnant auprès de la muraille avec son cocher endormi.