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Page:F.Douglass, Mes années d'esclavage et de liberté, 1883.djvu/106

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XVII

le point tournant.


Ni l’âme fatiguée, ni le corps endolori ne trouvent toujours le sommeil. L’inquiétude, la déception me tenaient éveillé. Mon maître — avais-je espéré qu’il protégeât l’homme ? — ne consentait pas même à défendre le noir : sa propriété.

Sans un ami sur la terre — en avais-je un au ciel ? — empli d’amertume, couvert de honte et de blessures, je m’acheminai, avant jour, vers la ferme Covey. À peine sortais-je du bois, que fidèle à ses habitudes astucieuses, Covey, sautant hors du buisson où probablement il m’avait attendu la nuit, courut sur moi, muni d’une courbache et d’une corde. Il comptait sans son hôte. Tout affamé — je n’avais pas mangé depuis dix-huit heures — tout las que j’étais, je disparus dans la forêt. Covey en fut pour ses frais de courbache, de corde et de veille.

Me voilà dans l’ombre, dans le silence, seul avec la création, seul avec Dieu. Toute mon âme, il semble, devait s’élever en prières. Qui pouvait me délivrer, si ce n’est le Seigneur ? Mais j’avais entendu prier Covey,