Page:F.Douglass, Vie de Frédéric Douglass esclave Américain, 1848.djvu/127

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brute depuis six mois, et que j’étais bien décidé à ne plus le supporter. Après avoir entendu ma réponse, il tâcha de m’entraîner vers un bâton qui était à la porte de l’écurie. Il voulait s’en emparer pour m’assommer. Mais au moment où il se penchait pour le prendre, je le saisis au collet par les deux mains, et le renversai à terre par une secousse soudaine. À cet instant-là, Guillaume arriva. Covey lui cria de venir à son secours. Guillaume demanda ce qu’il fallait faire. « Viens le saisir ! viens le saisir ! » lui dit Covey. Guillaume lui répliqua que son maître l’avait loué pour travailler et non pas pour aider à me battre ; là-dessus, il nous laissa Covey et moi finir notre combat sans s’en mêler. Il dura près de deux heures. Enfin Covey, tout hors d’haleine, me lâcha, en me disant que si je ne lui avais pas résisté, il ne m’aurait pas fouetté la moitié autant qu’il l’avait fait. La vérité est qu’il ne m’avait pas fouetté du tout. Selon moi, il avait eu le dessous dans cette lutte, car il ne m’avait pas fait saigner, tandis que son sang avait coulé. Pendant les six mois suivants que je passai chez M. Covey, il ne leva pas même son petit doigt contre moi dans un accès de colère. Il disait quelquefois qu’il ne voulait pas m’empoigner de nouveau. « Non, me disais-je en moi-même, vous faites bien, car