Page:F.Douglass, Vie de Frédéric Douglass esclave Américain, 1848.djvu/66

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la liberté et du bonheur domestique. Mon départ pour Baltimore fut l’origine de ma prospérité subséquente. Je l’ai toujours regardé comme la première manifestation évidente de la bonté de la Providence, qui ne m’a jamais abandonné depuis, et qui n’a cessé, à différentes époques de ma vie, de me combler de faveurs. Je considérais comme quelque chose de très-remarquable que l’on m’eût choisi. Il y avait dans la plantation un grand nombre d’enfants qu’on aurait pu envoyer à Baltimore. Il s’en trouvait de plus jeunes, de plus âgés, et du même âge que moi. C’était moi sur qui le choix était tombé. Oui, j’étais le premier, le dernier, le seul qu’on eût choisi !

Peut-être qu’on me regardera comme superstitieux, et même comme égoïste, pour avoir vu dans cet événement une intervention spéciale de la Providence divine en ma faveur. Mais je n’exprimerais pas fidèlement les premiers sentiments de mon âme, si je m’abstenais de faire connaître cette opinion. J’aime mieux obéir à la voix de ma conscience, au hasard même de m’attirer les sarcasmes d’autrui, que de dissimuler la vérité et de devenir l’objet de ma propre aversion. Je date de mon âge le plus tendre la profonde conviction que l’esclavage ne pourrait me retenir pour toujours dans ses horribles