Page:FR-631136102 MS 2810 Gilberte Périer - Vie de Blaise Pascal et lettres.pdf/71

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
35

necessité le contraignoit à faire quelque choſe qui pouvoit leur donner de la satisfaction, il avoit une addresse merveilleuſe, pour en détourner son esprit afin qu’il nʼy prist point de part.

Par exemple ses continuelles maladies l’obligeant de se nourrir delicatement, il avoit un soin tres grand, de ne point gouster ce qu’il mangeoit, et nous avons pris garde que quelque peine quʼon prist à luy chercher quelque viande agreable, acause des dégousts à quoy il estoit sujet, jamais il n’a dit : voilà qui est bon. Et mesme quand on luy servoit quelque choſe de nouveau selon les saisons, si on luy demandoit après le repas, s’il l’avoit trouve bon ? Il disoit simplement : il falloit m’en avertir devant, car presentement je ne m’en souviens plus, et je vous avouë que je n’y ay pas pris garde. Et lors quʼil arrivoit que quelqu’un admiroit la bonté de quelque viande en sa présence, il ne le pouvoit souffrir, et il appelloit cela estre sensuel, encore mesme que ce ne fust que des choſes les plus communes ; parce qu’il disoit que c’estoit une marque quʼon mangeoit