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Page:Fabié - Œuvres, Poésies 1892-1904, 1905.djvu/40

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Alors la salle entière aux grands était livrée ;
Des voix fortes montaient et des rires bruyants,
La pinte au vin versait la joie à la verrée,
Les mots salés partaient faisant les yeux brillants,
— Hors ceux de notre mère en son rêve rentrée,

En son rêve mystique et doux où, chaque fois
Que les grossiers labeurs lui laissaient une trêve,
Elle se replongeait comme l’oiselle au bois,
— Âme tendre blessée aussi souvent d’un glaive
Que celle qui suivit son fils jusqu’à la croix !

Puis l’ombre reconquiert la salle, et le silence,
Et le sommeil… Un seul reflet du feu mourant
Frappe la vitre où le balancier se balance,
De son compas égal comptant et mesurant
Les heures qu’au repos donne sa vigilance ;

Tandis qu’un gazouillis discret et cristallin,
Bruit d’eau vive coulant dans l’épaisse muraille
Et qui rappelle, en bas dormant, le vieux moulin,
Berce tous nos chasseurs qui ronflent, et les raille
Jusqu’à l’aube de son rire frais et malin.