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Page:Fabre - Les Auxiliaires (1890).djvu/129

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SUR LES ANIMAUX UTILES À L’AGRICULTURE

se lissent les plumes, et finalement s’endorment. Ces arbres sont des lieux de ralliement, où tous les soirs les corneilles se rassemblent des divers points du canton, quelquefois de plusieurs lieues à la ronde. Au lever du jour, elles se divisent par compagnies plus ou moins nombreuses et vont, qui d’ici, qui de là, chercher à manger dans les terres cultivées.

À la fin de l’hiver, la société générale est dissoute ; les corneilles s’apparient, et chaque paire se choisit dans quelque forêt voisine un district d’un quart de lieue de diamètre d’où tout autre couple est exclu, afin que chaque ménage trouve sa subsistance. Le nid est placé sur les arbres de moyenne grandeur. Le dehors est composé de petites branches et de racines entrelacées, grossièrement mastiquées avec de la terre ou du crottin de cheval ; le dedans est garni d’un matelas de fines racines. Si quelque oiseau de proie vient à passer à proximité du nid, le père et la mère l’assaillent avec fureur et lui fendent le crâne d’un coup de bec.

Émile. — Très bien, mes braves corneilles ; le rapace se tiendra pour dit qu’il ne fait pas bon venir troubler votre ménage.

Paul. — J’admire le courage des corneilles protégeant leur couvée, mais je ne peux leur pardonner leurs rapines dans les basses-cours, leurs vols de petits oiseaux et d’œufs, leurs fouilles dans les terres ensemencées. Inscrivez la corneille noire parmi les bandits à détruire.

Faites-en autant pour la corneille mantelée, ainsi appelée à cause de l’espèce de manteau ou plutôt de scapulaire gris blanc qui s’étend par devant et par derrière depuis les épaules jusqu’à la queue. Le reste du plumage est noir avec des reflets bleuâtres, comme celui du corbeau. Cette corneille nous arrive sur la fin de l’automne, se met en société des corneilles noires et des freux, et se répand dans les champs à la recherche des grains germés et des larves. Sur les bords de la mer, où elle est bien plus fréquente que dans l’intérieur des terres, elle vit de poissons et de coquillages rejetés par la vague ou abandonnés par les pécheurs. La disette seule peut la contraindre à se nourrir de charogne, régal de la corneille noire et du corbeau. En mars, la corneille mantelée nous quitte pour aller nicher dans les pays du nord.

Le freux, un peu plus petit que la corneille noire, a le plumage de cette dernière, avec des reflets plus violets et plus