Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, première série, 1916.djvu/124

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quième espèce guerroie encore contre des criquets dans les steppes des environs de la Caspienne. Ainsi, sur le pourtour de la Méditerranée, nous aurions cinq Sphex différents, dont les larves sont toutes livrées au régime des orthoptères.

Franchissons maintenant l’équateur et allons tout là-bas, dans l’autre hémisphère, aux îles Maurice et de la Réunion, nous y trouverons, non un Sphex, mais un hyménoptère très-voisin, de même tribu, le Chlorion comprimé, faisant la chasse à d’affreux kakerlacs, fléau des denrées dans les navires et dans les ports des colonies. Ces kakerlacs, ne sont autre chose que des blattes, dont une espèce hante nos habitations. Qui ne connaît cet insecte puant, qui, de nuit, grâce à son corps aplati comme le serait celui d’une énorme punaise, se glisse par les interstices des meubles, par les fentes des cloisons et fait irruption partout où il y a des provisions alimentaires à dévorer ? Voilà la blatte de nos maisons, dégoûtante image de la non moins dégoûtante proie chérie du Chlorion. Qu’a donc le kakerlac pour être ainsi choisi comme gibier par un confrère presque de nos Sphex ? C’est bien simple : avec sa forme de punaise, le kakerlac est lui aussi un orthoptère, aux mêmes titres que le grillon, l’éphippigère, le criquet. De ces six exemples, les seuls à moi connus et de provenance si diverse, peut-être serait-il permis de conclure que tous les Sphex sont chasseurs d’orthoptères. Sans adopter une conclusion aussi générale, on voit du moins quelle doit être, la plupart du temps, chez le Sphex, la nourriture des larves.

À ce choix surprenant, il y a une cause. Quelle est-elle ? Quels motifs déterminent un ordinaire, qui, dans les limites rigoureuses d’un même ordre entomologique, se compose ici d’infects kakerlacs, ailleurs de criquets un peu secs, mais de haut goût, ailleurs encore de grillons dodus ou bien d’éphippigères corpulentes ? J’avoue n’y