Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, première série, 1916.djvu/253

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tement ont leurs terriers dévalisés par des Tachinaires, des Miltogrammes surtout. Divers observateurs, notamment Lepeletier de Saint-Fargeau, ont parlé des manœuvres de ces effrontés Diptères ; mais aucun, que je sache, n’a entrevu le côté si curieux du parasitisme aux dépens des Bembex. Je dis si curieux, car, en effet, les conditions sont bien différentes. Les nids des autres fouisseurs sont approvisionnés à l’avance, et le Miltogramme dépose ses œufs sur les pièces de gibier au moment où elles sont introduites. L’approvisionnement terminé et son œuf pondu, l’Hyménoptère clôture la cellule, où désormais éclosent et vivent ensemble la larve légitime et les larves étrangères, sans jamais être visitées dans leur solitude. Le brigandage des parasites est donc ignoré de la mère et reste impuni faute d’être connu.

Avec les Bembex, c’est bien tout autre chose. La mère rentre à tout moment chez elle, pendant les deux semaines que dure l’éducation ; elle sait sa géniture en compagnie de nombreux intrus, qui s’approprient la majeure partie des vivres ; elle touche, elle sent au fond de l’antre, toutes les fois qu’elle sert sa larve, ces affamés commensaux qui, loin de se contenter des restes, se jettent sur le meilleur ; elle doit s’apercevoir, si bornées que soient ses évaluations numériques, que douze sont plus que un ; les dépenses en victuailles disproportionnées avec ses moyens de chasse l’en avertiraient d’ailleurs ; et cependant, au lieu de prendre ces hardis étrangers par la peau du ventre et de les jeter à la porte, elle les tolère pacifiquement.

Que dis-je : elle les tolère ? Elle les nourrit, elle leur apporte la becquée, ayant peut-être pour ces intrus la même tendresse maternelle que pour sa propre larve. C’est ici une nouvelle édition de l’histoire du Coucou, mais avec des circonstances encore plus singulières. Que le Coucou, presque de la taille de l’Épervier, dont