Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, première série, 1916.djvu/270

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des lieux pour dérouter la bête. – Je recouvre l’entrée d’une pierre plate, large comme la main. Bientôt l’Hyménoptère arrive. Le changement profond qui s’est fait en son absence sur le seuil du logis, paraît ne lui causer la moindre hésitation ; du moins le Bembex s’abat tout aussitôt sur la pierre, et cherche un moment à creuser, non au hasard sur la dalle, mais en un point qui correspond à l’orifice du terrier. La dureté de l’obstacle l’a promptement dissuadé de cette entreprise. Il parcourt alors la pierre en tous sens, la contourne, se glisse par dessous et se met à fouiller dans la direction précise du logis.

La pierre plate est trop peu pour dérouter la fine mouche : trouvons mieux que cela. Afin d’abréger, je ne laisse pas le Bembex continuer ses fouilles, qui, je le vois, aboutiraient promptement au succès ; je le chasse au loin avec le mouchoir. L’absence assez longue de l’insecte effrayé me permettra de préparer à loisir mes embûches. Quels matériaux maintenant employer ? En ces expérimentations improvisées, il faut savoir tirer parti de tout. Non loin, sur le chemin, est le crottin frais d’une bête de somme. Voilà du bois pour faire flèche. Le crottin est recueilli, mis en morceaux, émietté, puis répandu en une couche d’au moins un pouce d’épaisseur, sur le seuil du terrier et des alentours, dans une étendue d’un quart de mètre carré environ. Voilà certes une façade d’habitation comme jamais Bembex n’en connut de pareille. Coloration, nature des matériaux, effluves stercorales, tout concourt à donner le change à l’Hyménoptère. Prendra-t-il cela, cette nappe de fumier, cette ordure, pour le devant de sa porte ? – Mais, oui : le voici qui arrive, examinant de haut l’état insolite des lieux, et prend pied au centre de la couche, précisément en face de l’entrée. Il fouille, se fait jour à travers la masse filandreuse, et pénètre jusqu’au sable où l’orifice du