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Page:Fabre - Souvenirs entomologiques edition7 Serie 9.djvu/377

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LE KERMÈS DE L’YEUSE

L’année suivante, au retour du printemps, je devais apprendre que la présence d’une végétation au pied de l’arbre n’est pas nécessaire. Revenons à l’yeuse de l’enclos. J’avais garni sa frondaison d’une trentaine de Kermès parvenus à maturité. Il en était sorti, par caravane, une multitude d’émigrants. Or, au pied de l’yeuse, ainsi qu’à la ronde dans une étendue de quelques pas, le sol est parfaitement nu. Aucun brin de gazon ou d’herbage quelconque ne pousse en ce recoin expurgé récemment par la bêche. Quant aux racines de l’yeuse elle-même, il est inutile, ce me semble, d’en tenir compte : elles sont à des profondeurs où l’animalcule ne peut les atteindre. Et cependant, en mai, l’arbuste, jusque-là exempt de Kermès, se peuple de pilules noires. Mon semis a prospéré. Les bestioles issues des coques ont passé la mauvaise saison dans le sol et sont revenues sur l’arbre au retour des chaleurs pour s’y transformer en globules. De quoi ont-elles vécu dans ce terrain ingrat, où pas une radicelle ne se trouve ? Probablement de rien.

Elles descendent à terre, plutôt en recherche d’un gîte que d’un réfectoire. Contre la rudesse de l’hiver, leur refuge est bien précaire s’il consiste, comme tout semble le dire, en quelques fissures dans un grain terreux, non loin de la surface. Par le fait des intempéries, combien il doit en disparaître, de ces mal protégées ! Aux ravages des mangeurs d’œufs à la coque s’adjoignent, plus terribles, ceux de la mauvaise saison ; aussi, pour conserver un, le Kermès procrée des mille et des mille.

Le reste de l’histoire n’est pas d’acquisition aisée. Avril commence. Mes trois enfants, joie de mes vieux jours, me prêtent la subtile vue de leur jeune âge. Sans