Page:Faguet - En lisant Nietzsche, 1904.djvu/111

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signe que l’homme a besoin d’une foi, d’une certitude mystique, et elle confirme et fortifie dans l’esprit de l’homme cette manie de crédulité et ce besoin irrationnel et enfantin de certitude mystique. « L’impétueux désir de certitude se décharge aujourd’hui dans les masses compactes avec des allures scientifiques et positivistes « et « ce désir d’avoir à tout prix quelque chose de solide, est ce même désir d’un appui, d’un soutien, ce même instinct de faiblesse qui crée ou conserve les religions et les métaphysiques ». La confiance en la science c’est tout simplement une piété ; ce n’est pas autre chose. « De quelle manière, nous aussi, nous sommes encore pieux ? » Le voici. Nous faisons, nous « scientifiques », le ferme propos de ne pas croire par foi, par conviction a priori, de ne croire que ce qui aura été démontré réel et démontré vrai. Fort bien. Mais pour que nous nous imposions cette discipline, « pour que cette discipline puisse commencer », ne faut-il pas une conviction a priori, à savoir que le démontré est meilleur que l’indémontré ? Certainement il faut cette conviction, et impérieuse et absolue, et qui est un impératif, et qui, elle, n’est pas démontrée. Mais, s’il vous plaît, c’est une foi ! « On voit donc bien que la science aussi repose sur une foi et qu’il ne saurait exister de science inconditionnée. »