Page:Faguet - En lisant Nietzsche, 1904.djvu/127

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dition de notre être intellectuel ; nous ne pouvons pas penser sans prendre conscience d’une certaine quantité de nos représentations ; mais ceci n’est qu’un accident, relativement assez rare, et, sans doute, nous est nécessaire pour penser, mais n’est nullement le fond et n’est même que la surface de notre être intellectuel. De même la conscience morale n’est que la conscience intellectuelle d’un commencement d’acte auquel nous attribuons une valeur ou une beauté, et nous avons besoin de cette conscience pour agir ; elle conditionne nos actes ; elle est la condition de nos actes ; sans elle nous n’aurions pas de raison d’agir ou nous aurions une autre raison d’agir. Faut-il en conclure qu’elle est impérative et légitimement impérative ? Non pas. Elle est un mobile comme un autre, à contrôler comme un autre, divisible et subdivisible en plusieurs arrière-mobiles, comme un autre, et non pas une table vivante de la loi, à quoi nous n’avons qu’à nous conformer aveuglément.

— Vous médirez : « Contrôlable ! Contrôlable par quoi ? Par la conscience, sans doute ; et nous voilà au rouet. » — Je vous répondrai : « Mais certainement ! Contrôlable par la conscience au delà de la conscience ; et comme il y a des arrière-mobiles dans le commandement de la conscience considéré comme mobile, il doit y avoir des arrière-consciences pour