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Page:Faguet - Le Libéralisme.djvu/237

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de penser pour tout son peuple, d’agir pour tout son peuple et de ne point permettre que personne de son peuple agisse ou pense par lui-même. Il a charge d’âmes devant Dieu.

S’il est seulement homme de grande volonté, il pensera exactement de même ; et vous avez remarqué ce que sont dans une famille les hommes ou les femmes de grande volonté : ils n’admettent pas d’autre pensée que la leur.

S’il est homme de grande intelligence, il souffrira à la pensée que d’autres que lui pensent, délibèrent et résolvent dans son empire, remarquant que bien souvent ils pensent, délibèrent et résolvent des sottises.

Et s’il est un imbécile, ce sera bien pire ; car alors il sera orgueilleux comme un imbécile, et toute contradiction à ses idées et toute limite à son autorité le rendront absolument furieux.

Pour toutes ces raisons, il est aussi difficile qu’un monarque absolu, ou même quasi absolu, soit libéral qu’il l’est qu’un câble passe par le chas d’une aiguille.

Et pourtant, à supposer un roi, même absolu, qui serait intelligent et qui ne serait ni trop volontaire ni trop orgueilleux, rien ne serait plus raisonnable à lui que d’être très libéral. Un roi peut s’accommoder du libéralisme, et le libéralisme peut s’accommoder d’un roi. Un roi pourrait et devrait se dire :