Page:Faguet - Le Libéralisme.djvu/282

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peut se demander quelquefois si c’était la peine de la faire.

De toutes les idées de la Révolution française les démocrates français n’en ont pris que deux, qui sont exactement tout leur credo : l’égalité et la souveraineté du peuple ; et ils les ont poussées à leurs conséquences naturelles et à leurs conséquences extrêmes. Profondément monarchistes encore en cela ; car l’idée, la maxime et la devise sont exactement les mêmes qu’autrefois. Louis XIV ne voulait que des égaux sous un souverain absolu qui était lui. Le peuple ne veut que des égaux sous un souverain absolu qui est lui. — Il y a cette différence ; indiquée plus haut et qu’il faut rappeler, c’est qu’un roi peut être libéral, par goût personnel, tandis qu’un peuple… peut l’être aussi, et c’est pour qu’il le soit que nous écrivons ; mais beaucoup plus difficilement. Le roi sent qu’il est une force factice, immense sans doute ; mais factice, en ce sens qu’elle dépend en somme de la fidélité de son peuple, de l’adoration séculaire dont son peuple l’entoure ; et il sent qu’il ne faut pas qu’il épuise, en quelque sorte, cette réserve de fidélité et d’adoration ; il sent qu’il doit tenir compte de l’opinion publique. Un peuple se sent force réelle, et il est parfaitement indifférent aux opinions particulières qui ne sont pas celles de la majorité, de la moitié plus un de lui-même.

C’est pour cela même, ou c’est une des raisons