Page:Faguet - Le Libéralisme.djvu/288

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2° Une autre souveraineté se crée, la souveraineté nationale, c’est-à-dire l’oppression des deux tiers environ de la nation par le troisième tiers. — En effet, ces députés de tout à l’heure, qui exercent le gouvernement aristocratique en concentrant les trois pouvoirs, et c’est-à-dire qui exercent la tyrannie, ils sont pourtant, à certains intervalles de temps, forcés de se soumettre à la réélection, responsables devant les électeurs. Il s’agira donc pour eux de se créer une clientèle fidèle, solide, très attachée, qui dépendra d’eux. Ils feront leurs calculs : « Il nous suffit, pour avoir la majorité dans nos chambres souveraines, d’un tiers des électeurs, c’est-à-dire de quatre millions d’hommes environ sur quarante millions d’habitants. A la rigueur, cela suffit. C’est avec ces quatre millions d’hommes derrière nous que nous gouvernerons souverainement, absolument, comme un roi d’Afrique, tout le pays. Il s’agit de trouver quatre millions d’hommes qui ne se soucient nullement des Droits de l’homme, et qui aient intérêt à ce que nous soyons le gouvernement. Ce n’est pas très difficile. — D’abord beaucoup d’hommes n’ont aucun souci des Droits de l’homme, qui, après tout, s’ils intéressent généralement la nation, à ce point que toute nation qui en sera privée est destinée à périr, n’intéressent directement, individuellement, que des gens assez cultivés, et d’autre part ne sont compris comme intéressant la nation que par des gens plus culti-