Page:Faguet - Le Pacifisme.djvu/42

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désirer pour eux-mêmes ou les craindre en considération des moyens qui seraient nécessaires pour les fonder : « Qu’on ne dise point que si son système n’a pas été adopté, c’est qu’il n’était pas bon ; qu’on dise au contraire qu’il était trop bon pour être adopté ; car le mal et les abus, dont tant de gens profitent, s’introduisent d’eux-mêmes ; mais ce qui est utile au public ne s’introduit guère que par la force, attendu que les intérêts particuliers y sont toujours opposés. Sans doute la paix perpétuelle est à présent un projet bien absurde ; mais qu’on nous rende un Henri IV ou un Sully, la paix perpétuelle deviendra un projet raisonnable. Ou plutôt admirons un si beau plan ; mais consolons-nous de ne pas le voir exécuter ; car cela ne peut se faire que par des moyens violents et redoutables à l’humanité. On ne voit point de ligues fédératives s’établir autrement que par des révolutions, et, sur ce principe, qui de nous oserait dire si cette ligue européenne est à désirer ou à craindre ? Elle ferait peut être plus de mal tout d’un coup qu’elle n’en préviendrait pour des siècles. »

Ailleurs, saisissant très bien le nœud même de la question, Rousseau insiste sur ceci que le droit civil régit les individus faisant partie d’une nation ; mais que le droit naturel, c’est-à-dire la force, continue de régir les nations : « Le droit civil