Page:Faguet - Le Pacifisme.djvu/86

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affaiblit pour un temps d’une façon très sensible, jusqu’à ce qu’on en ait recueilli le bénéfice par l’assimilation de l’annexé.

Mais cette assimilation, combien de temps demande-t-elle ? Le plus souvent un temps indéfini. La faiblesse secrète de l’Autriche et qui a été cause de la plupart de ses malheurs, c’était sa domination sur l’Italie. L’Italie était son boulet, qui la tirait en arrière à tous les mouvements d’offensive ou même de défense qu’elle faisait d’un autre côté. L’Irlande est encore un embarras et une cause de faiblesse pour l’Angleterre. Un peuple annexé c’est un membre que l’on s’ajoute ; oui ; mais c’est un membre paralysé et qui vous paralyse. Il y a toujours ou il pourrait toujours y avoir, chez un peuple vainqueur d’hier, deux partis, l’un qui dirait : « Annexons pour nous fortifier », l’autre qui dirait : « N’annexons pas, de peur de nous affaiblir », et il serait vraiment difficile de savoir qui aurait raison, tant cela dépend des circonstances et de circonstances qu’on ne peut prévoir. En 1870, il y avait des Allemands qui ne voulaient pas annexer l’Alsace-Lorraine : « Cela nous surchargerait, nous alourdirait, serait un poids mort. — Peut-être ; mais alors, à quoi nous sert-il d’avoir vaincu ? Soyons alourdis ; mais que le peuple vaincu soit affaibli. » Qui avait raison ?