Page:Faguet - Le Pacifisme.djvu/87

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Les choses semblent avoir bien tourné, mais personne n’en peut répondre. Il eût suffi que la France eût une politique intérieure et une conduite intérieure plus sympathiques aux Alsaciens-Lorrains pour que l’Alsace-Lorraine fût pour l’Allemagne une Lombardie-Vénétie ; et cela pourrait encore avoir lieu dans l’avenir.

Notez encore cette nécessité pour un peuple devenu conquérant de conquérir toujours. C’est une nécessité presque fatale. C’est une nécessité atténuée par la prudence ou augmentée par la témérité du peuple vainqueur ; mais c’est une quasi-nécessité. La vraie raison pour laquelle la Prusse a conquis et annexé l’Alsace-Lorraine c’est qu’elle avait conquis les petits peuples allemands. Il y avait chez les petits peuples allemands un patriotisme local et un patriotisme général qui se combattaient. La Prusse les conquiert. En les conquérant, à la fois elle les blesse et elle les satisfait. Elle blesse leur patriotisme local ; elle satisfait leur patriotisme général. Mais lequel est le plus fort et sont-ils plus satisfaits que blessés ou plus blessés que satisfaits ? Il y a doute. Il y a chez eux flottement. Pour que leur patriotisme général remporte décidément sur leur patriotisme local, il faut leur donner une satisfaction de patriotisme général ; il faut leur donner de la gloire allemande,