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plus antimétaphysiciens sont métaphysiciens encore.

Pour ne citer qu’un seul exemple, tel pur psychologue positiviste fait appel à chaque instant à l’inconscient, et s’il y a quelque chose d’inconnaissable par définition, c’est probablement l’inconscient, et voilà une psychologie positiviste s’appuyant sur un fondement métaphysique, par ce seul fait que nous-mêmes, en tout ce que nous sommes, nous flottons sur la métaphysique comme un bouchon sur l’océan, et que nous ne pouvons pas réfléchir seulement sur nous-mêmes sans percevoir tout proche l’immense abîme mouvant, obscur et insondable.

Voilà une première raison pourquoi il était difficile que Platon ne fût pas métaphysicien.

De plus, en tout temps encore, il est très difficile à un homme qui veut fonder une morale de n’être pas métaphysicien et de ne pas essayer de fonder sa morale sur une métaphysique. Et cela pour une raison assez simple : c’est que si la morale ne se fonde pas sur une métaphysique, elle ne se fonde sur rien du tout. La morale c’est : « tu es obligé ». Si elle n’est pas cela, il me semble bien qu’elle n’est rien. Si elle n’est pas cela, elle est sans vertu et sans force. Si elle n’est pas cela, elle est une simple recommandation de prudence ou d’élégance.