Page:Faguet - Pour qu’on lise Platon, Boivin.djvu/121

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ne l’est point de tout le reste. On doit n’attribuer les biens qu’à lui ; quant aux maux, il en faut chercher une autre cause que Dieu. Il ne faut pas ajouter foi à Homère ni à aucun autre poète assez insensé par blasphémer contre les dieux et pour dire que « sur le seuil du palais de Zeus il y a deux tonneaux pleins, l’un des destinées heureuses, l’autre de destinées malheureuses, et que si Zeus puise dans l’un et dans l’autre pour un mortel, sa vie est mêlée de bons et de mauvais jours ; mais que si Zeus ne puise que dans le second, la faim dévorante poursuit cet homme sur la terre féconde ». — Il ne faut pas croire que « Zeus est distributeur des biens et des maux. » « Lorsqu’on dira devant nous que Dieu, qui est bon, a causé du mal à quelqu’un, nous nous y opposerons de toutes nos forces… Notre première loi et notre première règle touchant les dieux sera d’obliger nos citoyens à reconnaître, soit de vive voix, soit dans leurs écrits, que Dieu n’est pas auteur de toutes choses, mais seulement des bonnes. »

Tel est ce qu’on appellera, si l’on veut, le Manichéisme de Platon. Il y a deux principes, un principe de bien et un principe de mal. Le principe de bien, c’est Dieu ; le principe de mal, ce n’est pas à proprement parler un Dieu méchant ; car pareille