Page:Faguet - Pour qu’on lise Platon, Boivin.djvu/14

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

consiste à ne pas conclure. Toutes ses méthodes, car il en a plusieurs, sa maïeutique, sa dialectique, son éristique, sa polémique, aboutissent généralement à ne conclure pas et sont, surtout, soit des moyens de ne pas conclure, soit des excuses à ne conclure point.

Sa maïeutique consiste à tirer d’un prétendu interlocuteur une idée que cet interlocuteur avait sans le savoir et qu’il est tout étonné et effrayé de produire. Matremque suus conterruit infans. Cela dispense de conclure soi-même ; parce que cela fait une petite comédie qui satisfait le lecteur par un dénouement non par des conclusions et qui l’éloigne du désir devoir conclure.

Sa dialectique, qui du reste se confond souvent avec sa maïeutique, consiste, quand elle se distingue de celle-ci, en une pluie de petits arguments cinglants et aigus, qui souvent, reconnaissons-le, sont dans la question ou dirigent droit sur la question ; mais souvent aussi en éloignent et ne paraissent destinés qu’à la faire oublier et à étourdir celui qui s’en préoccupe.

Et ainsi, soit malice, soit impuissance déguisée en adresse, c’est presque toujours quand on touche au point, que Platon fait donner sa garde d’arguments déployés en tirailleurs, pour nous en écarter brusquement et nous faire battre les buissons creux.