Page:Faguet - Pour qu’on lise Platon, Boivin.djvu/15

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Le plus souvent du reste, on le sent, toute sa méthode est polémique et critique et ne vise qu’à confondre des ennemis intellectuels et à emporter sur eux des triomphes d’esprit.

Toutes ses méthodes ne laissent pas de se ramener un peu à cette méthode d’engourdissement de l’adversaire, de paralysation de l’adversaire, qu’il a si joliment définie dans le Ménon : « J’avais ouï dire, Socrate, avant que de converser avec toi, que tu ne savais autre chose que douter de toi-même et jeter les autres dans le doute ; et je vois à présent que tu fascines mon esprit par tes charmes, tes maléfices et tes enchantements, de manière que je suis tout rempli de doutes. Et, s’il est permis de railler, il me semble que tu ressembles parfaitement, pour la figure et pour tout le reste, à cette large torpille marine qui cause de l’engourdissement à tous ceux qui l’approchentet qui la touchent. » En vérité presque toujours Platon est trop complètement satisfait quand il a réduit ses adversaires au silence, ce qui du reste lui est assez facile, puisque c’est lui qui les fait parler ; et il se soucie peu d’arriver lui-même à des conclusions fermes et arrêtées. La plupart de ses dialogues, ceux-là mêmes qui touchent aux questions les plus importantes, se terminent sur une digression, sur un point de détail, sur une affaire assez étrangère, quelquefois, à ce