Page:Faguet - Pour qu’on lise Platon, Boivin.djvu/35

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pendance ; la bonne opinion de soi-même délivra chaque citoyen de toute crainte, et l’absence de crainte engendra l’impudence ; et poussa l’audace jusqu’à ne pas craindre les jugements de ceux qui valent mieux que nous, c’est la pire espèce d’impudence ; elle prend sa source dans un esprit effréné d’indépendance. À la suite de cette espèce d’indépendance vient celle qui se soustrait à l’autorité des magistrats ; de là on passe au mépris de la puissance paternelle ; on n’a plus pour la vieillesse et pour ses avis la soumission requise. À mesure qu’on approche du terme de l’extrême liberté, on arrive à secouer le joug des lois, et quand on est enfin arrivé à ce terme, on ne respecte ni ses promesses ni ses serments, on ne connaît plus de Dieux ; on imite et l’on renouvelle l’audace des anciens Titans et l’on aboutit, comme eux, au supplice d’une existence affreuse qui n’est plus qu’un enchaînement de maux… »

Il y a une objection à ces assertions véhémentes. La démocratie est peut-être l’esprit d’indépendance impatiente ; elle est peut-être l’ignorance ; mais cependant, et elle l’a montré, elle sait choisir des chefs ; et ces chefs, eux, sont instruits et intelligents ; ils ont, eux, la « science royale » et parfois même ils ont du génie. — Platon a très souvent, sans doute, entendu, de ses oreilles, cette objec-