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mot anti a dans « antipodes », d’enseigner la rhétorique.

Tout au fond et sans tant de distinctions, les sophistes sont nés sophistes, c’est-à-dire nés ingénieux et peu scrupuleux, pleins de talents et sans conscience ; et ils se sont développés dans le sens de leur nature, plus ou moins cyniquement, tous s’enivrant et enivrant et éblouissant les autres de prestiges littéraires et ne tenant aucun compte de la morale ou n’y songeant point.

Or ceci est très grave, parce qu’ils sont les éducateurs de la jeunesse et les maîtres de l’esprit public et parce que les Athéniens n’ont que trop de tendance à faire entrer peu de préoccupations morales dans leur conduite tant privée que publique.

Et c’est Socrate qui a été accusé formellement de « corrompre les jeunes gens » et qui a été condamné et exécuté pour cela ! Et il n’y a rien de plus naturel, ou, du moins, ce n’est pas trop paradoxal. Les sophistes ont habitué les Athéniens à vivre sans préoccupations morales et en très grande estime d’eux-mêmes, malgré cette lacune. Un homme qui est venu dire à leurs fils ou à leurs jeunes frères : « Vous oubliez le plus important ; vous oubliez l’essentiel », d’abord choquait