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Page:Faguet - Voltaire, 1895.djvu/122

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Voltaire

Que-viens-tu m’annoncer dans ce séjour d’horreur ? »
Alors il entendit ces mots pleins de douceur :
« Je suis cet heureux roi que la France révère,
Le Père des Bourbons, ton protecteur, ton père ;
Ce Louis qui jadis combattit comme toi,
Ce Louis dont ton cœur a négligé la foi,
Ce Louis qui te plaint, qui l’admire et qui t’aime.
Dieu sur ton trône un jour te conduira lui-même ;
Dans Paris, ô mon fils, tu rentreras vainqueur,
Pour prix de ta clémence, et non de ta valeur.
C’est Dieu qui t’en instruit, et c’est Dieu qui m’envoie. »
Le héros, à ces mots, verse des pleurs de joie.
La paix a dans son cœur étouffé son courroux.
Il s’écrie, il soupire, il adore à genoux ;
D’une divine horreur son âme est pénétrée ;
Trois fois il tend les bras à cette ombre sacrée ;
Trois fois son père échappe à ses embrassements,
Tel qu’un léger nuage écarté par les vents.

C’est Louis XII, le père du peuple, que Henri IV, transporté par saint Louis au séjour des bienheureux, contemple et vénère au milieu des rois justes :

Le sage Louis XII, au milieu de ces rois,
S’élève comme un cèdre, et leur donne des lois.
Ce roi, qu’à nos aïeux donna le ciel propice.
Sur son trône avec lui fit asseoir la justice ;
Il pardonna souvent, it régna sur les cœurs,
Et des yeux de son peuple il essuya les pleurs.

C’est Richelieu, Mazarin, Colbert, Louis XIV ; car, à l’imitation de Virgile, Voltaire fait apparaître à Henri IV, en ce séjour céleste, non seulement ceux qui ne sont plus, mais ceux qui doivent naître un jour, et peut faire ainsi entrer dans son poème un résumé de l’histoire de France :

Henri, dans ce moment, voit sur les fleurs de lis
Deux mortels orgueilleux auprès du trône assis :