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CXVIII

PROVISOIRE ÉPILOGUE



J’ai l’air de répéter toujours la même chose…
C’est vrai : que voulez-vous ? je n’aime qu’une chose
Au monde : la Langue française ; en ça, je suis
Un patriote irréductible, je ne puis
Concevoir trahison plus grande envers la France
Que d’écrire un vilain français ! est-ce un maintien
Où je m’incruste par pose ? Oh, du tout ! ça vient
D’une très réelle et très cuisante souffrance :
Ah ! moi, — comme de bon cœur je vous donnerais
L’Alsace et la Lorraine pour un bon poète !
Et, je le jure, avec l’assurance complète,
Qu’à l’échange, c’est la France qui gagnerait !
Ce qui fait la force et la grandeur d’une race,
Ce n’a jamais été l’épée de ses bouchers
Mais sa Pensée, une phosphorescente trace
Dont elle imprégnera tout ce qu’elle a touché :
La Littérature est une chose sacrée ;
Le Verbe est Dieu ; le Verbe est la pensée ailée
Et le reste n’est rien que prostitution :
L’Artiste a pour irrésistible mission
D’incorporer dans leur embrassement superbe
La splendeur de l’Idée à la splendeur du Verbe