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Page:Fargèze - Mémoires amoureux, 1980.djvu/278

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ou vivent. Je n’ai même pas changé leurs noms. Seul celui de mon village natal est travesti, et l’on chercherait vainement Saint-Brice sur la carte de la Côte-d’Or.

Je suis heureux. Je m’abandonne à d’agréables habitudes parisiennes. Je n’épuise mes revenus qu’en faisant un peu de bien autour de moi. Je continue d’accoupler des rimes. Je vis avec les jeunes. Je suis le moins fatigué de tous et de beaucoup le moins désabusé. J’ai des amies ravissantes. Et n’ai-je pas aussi Marion, si belle et bonne fille ? Gaie comme une fauvette, avec ça. Justement, la voici.

— Marion, je parle de toi dans mes Mémoires. Tiens, regarde, c’est écrit : « Marion Ledébert est une belle et bonne fille. » Allons, viens que je t’embrasse. On ne se lasse pas d’y promener la main, sur ce rond petit derrière…

Bon estomac, cœur vaillant et le reste. Santé cérébrale parfaite. Je pourrai faire longue route encore. Certes, je ne quitterai pas sans regret ce bas monde, car il valait le voyage, mais je verrai venir la nuit finale avec sérénité. Et foin du curé : il n’entendra pas ma dernière prière. Elle sera pour la bonne Nature, qui tant m’aura donné de joies. Je la remercierai de m’avoir fait sensible aux émotions de l’âme comme à celles des sens, au merveilleux chatoiement des choses. Que si tout cela est l’œuvre d’un Dieu, salut au Maître magnifique !

Mesdames et messieurs, bonsoir !