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SAINT-GERMAIN-DES-PRÉS

Qu’il y ait eu dans la journée un Conseil de Cabinet, un match de boxe dans l’État de New-Jersey, un Grand Prix de Conformisme, un coup de flanc littéraire, un concours de ténors sur la Rive Droite ou quelque prise de bec, les habitués des cafés de la place Saint-Germain-des-Prés sont parmi les premiers touchés des résultats de ces conciles ou de ces compétitions, soit par une estafette généralement bien renseignée, soit par une mystérieuse télégraphie. « Sensationnelles », vides ou graves, les nouvelles apportées des ministères ou des rings n’émeuvent pourtant pas les buveurs ou les passants de ce quartier, qui n’en continuent pas moins de surveiller, d’un œil sceptique et doux, la montée vers le ciel de ce vieux meuble couleur d’orage, pièce d’armure romane et martienne, qu’est le clocher d’une des plus vieilles églises de Paris.

La place Saint-Germain-des-Prés, qui ne figure pas dans le laïus adressé aux Yougoslaves et aux Écossais par le speaker du car de Paris la nuit, est pourtant un des endroits de la Capitale où l’on se sent le plus « à la page », le plus près de l’actualité vraie, des hommes qui connaissent les dessous du pays, du monde et de l’Art. Et ceci même le dimanche, grâce à ce kiosque à journaux qui