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Page:Fargue - Le Piéton de Paris, 1939.djvu/246

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présence confuse d’une foule d’établissements, le magasin de pipes, les chaussures, la Maison de l’Agriculture, les librairies, les avocats, l’Institut historique des Sciences Techniques ; plus loin, les cafés, qui font de la place Saint-Germain-des-Prés une des antichambres du Parlement, de l’Université, de l’Institut, je puis changer tout cela en appuyant sur le bouton de ma sonnette, et devenir, sans transitions compliquées, voyage, traversée. L’hôtel est un instrument de décision.

La flotte des hôtels parisiens et ses capitaines

Le soir, quand je rentre au Palace, porteur de revues, de journaux, de toute une cueillette d’idées dans le Paris littéraire, je trouve M. X…, le directeur, et sa femme, qui pilotent leur maison dans la nuit. Les glissades de l’ascenseur, le rythme des lumières, qui indiquent la respiration de l’immeuble, la pénétration du téléphone, qui amène goutte à goutte des voix lointaines, me font songer aux quinze cents hôtels ancrés dans Paris. Le Palace, ses directeurs et moi, à cette heure de nuit où il faut veiller, prévoir, compter, faisons tous trois partie de cette flotte. Tandis que nous bavardons à l’avant de notre bateau blanc, qui croise dans les eaux du carrefour Buci, des clients rentrent un à un, saluent, prennent leur clef, esquissent la journée du lendemain, ou donnent quelques indications sur l’emploi de leur soirée : Celui-ci vient de perdre au poker tout ce qu’il possédait : on lui avance quelques billets,