Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/126

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Or, c’était là un jugement téméraire. Tout aussitôt la pluie augmenta. Les gouttes, espacées d’abord, se serrèrent, se joignirent, ne firent plus qu’une nappe opaque et pesante, qui, d’un seul coup, supprima le soleil et s’effondra sur la terre, parmi des craquements de branches brisées. Il y eut comme un piétinement d’eau sur le sol. En même temps, l’air immobile tressaillait et se précipitait en rafale. Un éclair flamboyant jaillit du milieu de la cataracte des nuages, et le tonnerre explosa si proche et si terrible que les chevaux du break se cabrèrent.

Madame Dax, que la foudre terrifiait, poussa des cris. Fougères, secoué de son humeur soucieuse, ôta promptement son veston et tâcha d’en abriter les jeunes filles, car la pluie quasi horizontale se ruait par l’entre-bâillement des rideaux et envahissait tout le break.

— Vite ! – cria madame Terrien au cocher.

Mais les chevaux affolés pointaient et se dérobaient. Il fallut plus d’un quart d’heure pour atteindre le chalet. Enfin la grille apparut. Le chèvrefeuille brutalisé par l’averse se débattait contre les barreaux de fer, et les clochettes du pied-de-biche sonnaillaient lamentablement.

— À l’abri, à l’abri ! – ordonna madame Terrien.

Elle bouscula mademoiselle Dax qui hésitait à sauter à terre, et l’entraîna en courant vers le perron. Madame Dax, annihilée par le tonnerre qui roulait par grands éclats ininterrompus, suivit, cramponnée au bras de Fougères. La pelouse était un lac orageux ;