Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/136

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fenêtre et remplit les verres avec le vin d’un carafon d’argent.

— Heureusement, – déclare-t-il, – que voici de quoi se moquer du Destin : le nectar favori d’un cardinal d’Espagne, lequel cessa de croire au paradis, après avoir goûté sur terre, disait-il, le vrai vin de Dieu. Et ces cigarettes-là m’arrivent de Stamboul par la valise. Dans leur fumée flotte la brume bleue du Bosphore…

Mademoiselle Dax but le vin du cardinal, sans l’apprécier peut-être autant qu’il eût fallu.


— Je pense, – dit mademoiselle de Retz en égrenant une grappe de raisins, – à votre maison, à votre fée et à vos huit jours.

— Pensez-y, mais n’en parlez pas.

— Pourquoi ?

— Vous et moi n’avons pas une idée commune sur cette sorte de choses. Rien qu’avec un mot, vous me blesseriez.

Elle sourit.

— Mon pauvre Fougères, je ne peux pas m’habituer à ce paradoxe d’un dilettante tel que vous, croyant à l’amour.

Il reposa son verre avec vivacité.

— Si j’étais bien galant, je vous répondrais du tac au tac : je ne peux pas m’habituer à ce sacrilège d’une femme belle comme vous, n’y croyant point. Mais rassurez-vous, je ne vais pas vous arrondir de guirlandes… Au contraire ! Je ne peux pas m’habituer à