Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/218

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et madame Dax obéissait ; quoique, méprisante, elle haussât les épaules, en songeant à l’inutilité de tant de précautions.

Mère et fille, côte à côte, marchèrent sur le trottoir du quai. La mi-octobre abattait par légions les feuilles des platanes. Le Rhône, grossi par les premières pluies d’automne, roulait de grandes vagues jaunes que les piles des ponts fendaient comme les proues des vaisseaux fendent la mer. La bise soufflait du nord. Des nuages couraient, bas.

— Bientôt l’hiver, observa madame Dax, pour rompre le silence.

Et mademoiselle Dax, toujours muette, opina d’un signe de tête.

Elles pressaient le pas, il était tard. Pour gagner du temps, madame Dax prit le plus court, et traversa l’eau par la passerelle du Lycée. Aérienne et fragile, suspendue par des câbles d’acier à deux pylônes de pierre, la passerelle enjambait le fleuve d’une seule arche, et cette arche vibrait dans le vent comme une corde de violoncelle. Sur l’autre rive, le lycée étalait sa façade de prison.

Quatre heures sonnèrent avant que madame et mademoiselle Dax eussent atteint la porte voûtée.

De loin, elles virent le flot des lycéens s’en échapper en tumulte, puis s’éparpiller sur le quai et dans les rues adjacentes.

Madame Dax eut un geste d’impatience. Bernard profiterait sans nul doute du retard de sa mère et de sa sœur pour courir jusqu’à la rue de la République.