Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/230

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Mais ce n’est pas commode pour une petite fille, de s’évader d’une maison pleine de gens !…

Sous la voûte des branches qui formaient berceau, l’allée s’assombrissait, mystérieuse comme le chemin magique qui, dans les contes de fées, conduit au palais des Belles Endormies. Un petit pont enjambait un ruisseau ; et au delà, on n’apercevait plus que les troncs pressés et que la broussaille drue, sans nulle trouée visible. C’était comme une forêt grave et brumeuse, hautaine et mélancolique. Les hêtres, verts encore comme en été, mêlaient l’étoffe souple de leurs feuilles au satin raide des fusains, au taffetas mat des troënes, au velours épais des lierres partout enroulés. Les tilleuls gigantesques, dépouillés plus tôt, parce que le vent d’hiver frappe d’abord leur cime plus haute, n’avaient plus que des rameaux nus, dentelle délicate et sèche, dont le ciel était revêtu comme d’une immense toile d’araignée. Et leurs feuilles tombées, jaunes à l’endroit et blanches à l’envers, tachetaient le sol d’or et d’argent. Trois sycomores roux gardaient la porte d’une cabane couverte de chaume d’où filtrait un peu de fumée. Un peuplier dardait vers le ciel sa tête pointue. Et le silence n’était troublé que par des cris grêles d’oiseaux invisibles.

— Il n’y a pas grand’chose de plus beau que ceci, – murmura Fougères.

Il respira voluptueusement le parfum mouillé des arbres et de la terre.

— Il faudrait, – pensait-il, – se promener lentement sur ce tapis de feuilles mortes, en tenant par la