Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/28

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car M. Dax, laborieux jusqu’à la manie, s’enorgueillissait de son fils.

Alice soupira. – Bernard rentrant seul avant elle, c’était une scène de reproches sur la planche ; il est vrai que Bernard rentrant en retard et se plaignant, c’en était une autre, pire…

On était au coin de la rue de l’Arbre-Sec. Bernard tout à coup salua une voiture qui passait. Mademoiselle Dax regarda.

C’était une voiture de maître, une Victoria très élégante. Les chevaux piaffaient en trottant, et le cocher portait grande livrée. Sur les coussins de cuir turquoise, une femme, assez belle, exhibait des cheveux trop roux, des yeux trop longs, des lèvres trop peintes, et une robe d’impératrice.

La dame sourit à Bernard et passa. Stupéfaite et scandalisée, mademoiselle Dax saisit le bras de son frère :

— Bernard ! tu perds la tête ? qu’est-ce qui te prend de saluer cette… cette cocotte !

Bernard, vexé, se rebiffa.

— Dis donc « grue » pendant que tu y es ! Cocotte ? c’est une femme rudement chic… Diane d’Arques, elle s’appelle…

Mademoiselle Dax haussa les épaules : la vertu bourgeoise de toutes ses honnêtes femmes de grand’mères se révoltait dans ses veines, la soulevait de dédain et de dégoût.

— M’man serait contente si elle t’entendait ! Où l’as-tu rencontrée, cette créature ?