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II


De toutes les routes qui rayonnent autour de Saint-Cergues, madame Dax ne souffrait que la route d’Arzier, parce que c’était la seule, à son dire, qu’on pût suivre un quart d’heure durant sans suer et souffler « comme un alpiniste ». Quant aux sentiers qui vont sous bois, il n’en fallait même pas parler, à cause des serpents, « qui pullulaient à coup sûr dans toutes ces herbes ». C’est pourquoi les promenades d’après-midi, qu’on faisait en famille, ne manquaient ni de soleil, ni de poussière, ni de monotonie. Madame Dax elle-même, qui les ordonnait, en bâillait à se décrocher la mâchoire. Mais c’était pour la santé de Bernard.

Ce soir-là, on rentrait. Bernard, à vingt pas en avant, s’efforçait, dans l’attente de rencontres féminines, d’avoir l’air d’un monsieur qui se promène seul. Alice, silencieuse et suivant une pensée secrète, marchait à côté de sa mère.

— C’est agréable de sortir avec toi, – déclara tout à coup madame Dax, hargneuse. – Tu n’as pas dit un mot depuis une heure.

Mademoiselle Dax, coupée de sa songerie, cessa de regarder les sapins noirs qui frangeaient l’horizon des collines.

— Quelle scie ! – Madame Dax monologuait volontiers,