Page:Farrere - Mademoiselle Dax.djvu/71

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— Peut-être un peu ; mais Gilbert a envie de voir nos mélèzes sous la neige.

— Madame, – déclare Gilbert, – la Suisse est un pays à voir l’hiver. Il faut être snob ou bourgeois pour y venir en été. Je ne sais même vraiment pas comment ma mère et moi sommes ici maintenant !

— Nous pouvons partir demain, si le cœur t’en dit ?…

— Et Carmen, et Fougères ?

— On les laissera. Nous voyagerons très bien nous deux…

— Mais mon opéra ?

— C’est vrai !… Restons.

Madame Terrien éclate d’un joli rire et se retourne vers madame Dax :

— Madame, vous devez nous trouver tous deux un peu toqués ? D’ailleurs, mon mari vous a probablement dit que je l’étais, moi au moins. Mais que voulez-vous ? je n’ai rien que mon fils pour m’attacher à la vie ; alors je fais toujours tout ce qu’il veut, sans m’inquiéter de savoir si c’est raisonnable ou non… Lui d’ailleurs, je dois le dire, fait aussi tout ce que je veux, même quand c’est tout à fait sans queue ni tête. Voilà, nous nous aimons d’une façon ridicule. Nous sommes un ménage d’amoureux…

Le fils se penche de côté ; la mère, d’un geste accoutumé, tend sa main ; et lui, baise cette main d’un baiser lent qui appuie et qui insiste…

Mademoiselle Dax ne détache pas ses yeux de cette main et de ces lèvres. Il y a là comme un aimant qui attire toute son âme…