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LE MAHA-BHARATA.

de m’en aller du côté, où je voyais briller la sécurité ! mais tu ne m’as point écouté. 6128.

» À mes sollicitations renouvelées plus d’une fois, tu as répondu, insensée : « Je suis née ici, j’ai vieillie ici, et mon père également. 6129,

» C’est d’ici, après un long séjour, que sont allés au Paradis ton vieux père, et ta mère, et tes parents, et tes aïeux : quel besoin d’habiter ailleurs ? » 6130.

» Femme, que l’amour de ta famille poussait à fermer tes oreilles à mes paroles, tu fais une perte de parent bien douloureuse pour moi. 6131.

» Cette perte, c’est la mienne, car je n’aurai jamais en moi la force d’abandonner ma famille, comme un mortel sans humanité. 6132.

» Je ne pourrai jamais abandonner en toi une épouse de noble maison, douée d’un excellent caractère, toujours fidèle, ne blessant jamais, vertueuse dans toutes les choses de la vie, qui est la mère de mes enfants ; toi, qui suis le sentier du devoir, femme aux sens toujours domptés, qui es pour moi semblable à une mère, que les destins ont mise près de moi comme un ami et qui fus toujours ma voie suprême ; — toi, qui me fus unie par ton père et ta mère ; toi, que j’ai demandée, suivant l’étiquette, pour fiancée du maitre de maison ; toi, que j’ai épousée avec les formules consacrées des prières. 6133-6134-6135.

» D’où me viendra la force d’abandonner mon fils, un enfant, qui n’a pas encore atteint l’adolescence et sur le visage de qui la barbe n’est pas encore née ? 6136.

» Comment pourrai-je abandonner, après que je lui ai donné la vie moi-même, cette toute jeune fille, dépôt, que m’a confié le magnanime Brahma pour le remettre à son