Page:Faucher de Saint-Maurice - À la brunante - contes et récits, 1874.djvu/126

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

118
à la brunante.

de mer, s’en consolait en reprenant un second coup.

— Là, vraiment, Cyprien, tu n’en prendrais pas ? Ça fait furieusement du bien pourtant, lorsqu’on est mouillé !

Cyprien eut un frisson ; il ne sentait plus la pression de ses doigts sur la barre ; l’onglée l’avait saisi, et détachant une main du gouvernail, il la tendit enfin vers Daniel et but à longs traits.

Il avait menti à sa pauvre morte !

Qu’advint-il d’eux depuis ? Nul ne le sait.

Le lendemain matin, on trouva à l’entrée du Banc une berge jetée au plein, la quille en l’air, et à ses côtés, maître Daniel Gendron qui avait perdu connaissance.

Depuis ce sinistre, on aperçoit à la veille du mauvais temps une flamme bleuâtre courir sur la baie.

— Suivant les rapports de ceux qui l’ont examinée, dit l’abbé Ferland, elle s’élève parfois au sein de la mer, à mi-distance entre Caraquet et Paspébiac. Tantôt petite comme un flambeau, tantôt grosse et étendue comme un vaste incendie, elle s’avance, elle recule, elle s’élève. Quand le voyageur croit être arrivé au lieu où il la voyait, elle disparaît tout-à-coup, puis elle se montre de nouveau, lorsqu’il est éloigné. Les pêcheurs affirment que ces feux marquent l’endroit où périt dans un gros temps une berge conduite par quelques hardis marins du nom de Roussi ; cette lumière, selon l’interprétation populaire, avertirait les passants de prier pour les pauvres noyés. —