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à la veillée.

raccommodait une horloge, sciait des billots, faisait le solage d’une maison, réparait une batterie de cuisine, ressemelait les vieilles bottes de la paroisse et de ses environs ; puis, l’argent dans sa sacoche de cuir, il retournait flâner au logis, et cela durait tant qu’il y avait du pain sur la planche, car avant tout, Jérôme Tanguay était homme à principes, et le travail continuel aurait pu contrarier la terrible profession que la Providence lui avait départie — être né pour faire un monsieur.

Lorsque j’eus l’honneur de lui serrer la main, il était scieur de gang au moulin de la Grande Rivière Blanche.

J’étais tombé sur une journée excellente pour tout le monde, paraît-il. D’abord il y avait de l’eau plein l’écluse, ce qui faisait aller gaîment le travail : puis, Jérôme avait sous le bras une cruche où devait bien se tenir à la gêne un gros gallon de whisky.

Il était alors en conversation animée avec le foreman qui avait réussi à réunir une corvée extraordinaire pour mettre en marche les scies rondes, et lui disait en ce moment :

— Monsieur, je viens vous annoncer que je suis à la veille d’une.

— D’une quoi ? reprit la grosse voix de l’honnête ingénieur.

— Oui, monsieur, j’ai l’honneur de vous informer que j’en fais trois par année.