Comme elle se plaignait fort tristement, le pêcheur tout effrayé la reconfia fort doucement à la vague qui l’avait recelée, et jura de ne plus remettre la main sur une ligne.
— Il a tenu parole, ajouta Létourneau, malgré qu’il eût manqué de faire sa fortune ce jour-là.
Tout de même, termina-t-il, avec un accent d’inexpugnable conviction, à sa place j’en aurais fait autant.[1]
C’était aussi l’avis de l’auditoire ; car pour certains pêcheurs il y a des poissons auxquels on ne touche pas.
Exemple : l’espèce de morue que le commerce désigne sous le nom de haddock et que le vulgaire appelle le poisson de Saint-Pierre. La légende veut que ce soit la première pièce tirée hors des filets par
- ↑ « Le 8 septembre 1725, on envoya de Brest à M. le comte de Maupas, un procès-verbal dressé par le nommé Jean Martin, pilote d’un navire français appelé Marie de Grâce. Ce procès-verbal, signé par le capitaine et tous ceux de l’équipage, qui savaient écrire, rapporte ce qui suit :
C’était le 8 Août 1720, jour de jeudi, les vents étaient à l’est sud-est, le navire était mouillé sur le banc de Terre-Neuve : sur les dix heures du matin, on vit à bâbord un homme marin. Un appelé Guillaume lui donna un coup de bâton ; l’homme marin montra le poing et fit une figure irritée ; puis en nageant, il passa à tribord, puis à l’arrière où il s’accrocha au gouvernail ; il vint à l’avant et regarda la proue où il y avait une tête de femme.
Le capitaine, alors, voulut le harponner ; mais il eut peur que ce ne fût le fantôme d’un matelot appelé la Commune qui s’était tué à bord du navire le 18 juillet. Il fit des signes menaçants et s’éloigna en nageant jusqu’à ce qu’on le perdit de vue. »
On rapporte, en outre, dans le procès-verbal :
1o. Qu’il était presque en tout semblable à un homme.
2o Qu’il y avait sept navires mouillés à peu de distance et en vue de la Marie de Grâce.
Des Sirènes. — Alphonse Karr.