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les blessures de la vie.

La lutte fut longue entre le prêtre et cet homme qui s’acheminait lentement vers le ciel par la voie douloureuse.

Tout l’avait quitté si brusquement sur terre. Sa femme était morte de la maladie dont il mourait ; en clouant sa tombe, il y avait enfoui son amour, son énergie, ses espérances. La pauvre malade emportait avec elle les économies de l’humble ménage ; les amis s’étaient effacés peu-à-peu devant la pauvreté naissante, et de quelque côté que le moribond tournât sa tête endolorie, il avait à pardonner.

Néanmoins, d’une main ferme, il prit son calice, but gravement les dernières gouttes, et s’inclina résigné devant son Dieu.

À l’heure de la mort, je dus le quitter pour courir à un autre grabat.

Lorsque je revins, trois gardiens se trouvaient silencieux auprès du cadavre : deux orphelins en pleurs, et un huissier venu pour saisir les quelques épaves de leur héritage, au nom de l’équité et de la justice.

Un créancier avait accompagné ce dernier. Porteur d’un transport d’assurance sur la vie, que M. Arnaud lui avait donné en garantie hypothécaire pour le prix d’achat de son emplacement, cet usurier s’était souvenu à temps que la prime de l’année n’avait pas été payée. Tout essoufflé il était venu exiger une dernière signature qui lui permît de toucher cette somme, et joyeux, il venait de me croiser