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LES ÎLES DANS

et du maquereau, constituent les apports de la campagne d’été. Quant à celle d’hiver, elle se fait pendant les mois de mars, avril et mai. Alors commence la chasse au loup-marin. Divisés par groupes de six ou dix hommes, vous voyez les Acadiens armés de cordes et de bâtons, prendre le pas gymnastique, et franchir en courant des distances de dix à douze milles, avant d’arriver sur le terrain de chasse. Pour y parvenir, il a fallu sauter par-dessus les crevasses et les profondes fissures des champs de glace, ou prendre la banquise par escalade. Mais qu’est-ce que tous ces dangers, au prix des plaisirs que va leur donner la chasse qui les attend ? Les loups marins ne sont-ils pas là, derrière cette muraille glacée, qui se prélassent en famille ? Et comme une trombe, les Acadiens arrivent sur les malheureux phoques qui ne se doutent de rien. Le massacre commence, au milieu des cris et des gémissements. Quand chacun a sa part de butin, les chasseurs reprennent la route du village, traînant leur proie derrière eux ; et ils sont prêts à recommencer leurs courses, tant que durent le jour et la bonne chance.

Né sur les bords de la mer, habitué à ses caprices, à ses caresses et à ses colères, le peuple acadien voit en elle son véritable domaine. Été comme hiver, il ne cesse de se confier à elle. La mer, fidèle à cette longue amitié, ne cesse à son tour, de les combler de ses inépuisables générosités.

Nous venions de ravitailler l’Anse-à-la-Cabane, et comme la nuit était survenue, il nous y fallut attendre le jour, pour débarquer plus commo-