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Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 2.djvu/114

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ETH
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toujours comme solidaires de tout ce qui nous entoure, hommes, bêtes, plantes et choses, solidaires du passé, du présent et de l’avenir, de toute la nature organique et inorganique de laquelle le grand devin Gœthe a dit qu’elle « verkoerpert den Geist und durchgeistigt den Koerper », c’est-à-dire matérialise l’âme et divinise le corps.

Pour projeter un peu plus de lumière dans l’inextricable labyrinthe de l’éternel devenir, je me résume en précisant :

J’ai dit que l’Univers d’unité constitutive était simultanément cause et effet et qu’il était éternel dans l’interdépendance du temps et de l’espace. De ces affirmations, que temps et espace étaient des notions subjectives se rapportant à nous, êtres fugitifs, j’ai conclu qu’objectivement l’Éternité était non existante.

Du fait que l’homme et l’humanité évoluent, je déduis qu’il devrait également en être ainsi des astres, des voies lactées et de l’éther, matrice des mondes.

Je m’inscris ensuite en faux contre la conception qu’il n’y aurait pas de limites pour les corps infiniment grands et que l’atome serait théoriquement divisible à l’infini. Pour étayer cette affirmation, je cite les plus grands soleils connus et les atomes qui en éclatant se transforment en électricité, et j’arrive à la conclusion, aussi bien en me basant sur les radiations des étoiles que sur la transformation des atomes en électricité, que la matière est indivisible, une, continue.

Pour ce qui est d’une loi de progrès éternel, embrassant l’ensemble de l’Univers, ce qui sous-entend pour son passé lointain la plus insondable des horreurs — hypothèse qui ne tient pas debout — et pour son avenir, l’universelle conscience jusque dans ses moindres détails, il est possible que j’aie été, en écrivant cela, involontairement le jouet de notre instinct de conservation, dont toute idée de survie n’est qu’un mouvement réflexe.

Notre existence humaine est l’image en raccourci de ce qui se passe dans l’ensemble de la nature et notre âme naît avec le corps dont elle fait partie, croît, arrive à son apogée, décline, se désagrège et retourne avec lui au Grand-Tout. C’est là, dans la Vie et dans la Mort, lois de l’Univers, qu’est toute l’explication de la légende de Dieu et du Diable, du principe du Bien et du Mal.

Les toutes dernières découvertes sur la structure de l’Univers nous mettent sur une voie qui permettra à un proche avenir de solutionner, sans recourir au miracle ni à la prestidigitation spiritualiste, les problèmes des atomes, des étoiles supergéantes, et aussi ce qu’il y a de vrai dans l’idée du progrès éternel et de l’immortalité.

Élucider est bien, mais n’est pas encore répondre et la question du pourquoi, n’en déplaise aux mânes de notre grand précurseur, Louis Büchner, s’impose autant à nos recherches scientifiques que celle du comment dans un monde où, contrairement à Camille Flammarion, il ne saurait y avoir ni plan arrêté ni cause finale.

En attendant que la science nous fournisse les précisions qui nous manquent, nous pouvons cependant conclure dès maintenant :

Premièrement, que tout est matière et vie en même temps dans l’évolution immortelle et illimitée, progressive et régressive de l’ensemble de l’Univers, mais que seules les manifestations individuelles que revêtent la Matière et la Vie sont essentiellement temporaires, passagères et fugitives. C’est là le « Weltschmerz » la douleur inhérente à la vie, de Schopenhauer.

Deuxièmement, que l’éternité de l’Univers est démontrée inéluctablement, mathématiquement par le fait de son existence.

Nos calculs actuels révèlent une étendue du cosmos explorée dépassant un diamètre de 300 millions et une périphérie d’un milliard d’années de lumière et dont l’âge se chiffre par des quintillions de siècles.

Si cette fraction du Grand-Tout, avec son million de voies lactées aux dimensions comparables à la nôtre et qui se meuvent dans l’espace à raison de 600 à 1.000 kilomètres par seconde — les étoiles ne marchent, en moyenne, qu’à 40 et 60 km par seconde — était limitée, elle se serait depuis longtemps agglomérée sous l’action de la gravitation. Or, comme il n’en est pas ainsi, nous ne pouvons conclure qu’à l’éternité de l’Univers.

À ceux — et ils sont, hélas, nombreux — qui s’élèvent encore avec effroi et horreur contre la conception d’un monde sans Dieu ni immortalité personnelle, sans hiérarchie sociale ni sanction d’aucune sorte, sans sentiment du Devoir tutélaire et où les frontières du Bien et du Mal ne sont séparées par aucune cloison étanche, à tous ces timorés nous ferons simplement remarquer ceci :

Notre seul et unique objectif est la recherche de la Vérité et nous n’avons cure de plaire ou de déplaire à autrui ni à nous-mêmes.

Toutes les sociétés du présent ou du passé ont été basées sur une éthique de contrainte et de devoir et les persécutions de l’Inquisition catholique valaient celles de Néron, qui n’a pas fait périr autant de gens que la Guerre du Droit et de la Justice de 1914-1919 !

L’homme n’ayant pas demandé de maître et la vie n’ayant pas de but en dehors d’elle-même, le droit à l’existence doit précéder le devoir de travailler et le seul moyen pour chacun de vivre sa vie le plus heureusement et le plus utilement possible est d’assurer préalablement, pour tous les hommes et pour toutes les femmes, l’Égalité économique, clé de voute de l’affranchissement intellectuel et de la solidarité morale de l’espèce humaine. — Frédéric Stackelberg.

ÉTERNITÉ n. f. Durée qui n’a ni commencement ni fin.

L’univers ne se conçoit que lié à l’idée d’Éternité : Dieu ou Matière, car il est évident : qu’un « commencement absolu » est une absurdité. On ne conçoit pas plus la création de quelque chose que sa perte totale : « Rien ne se crée, rien ne se perd. »

Longtemps, par ignorance et par foi, on a supposé un Dieu créateur de l’Univers, nécessairement éternel. Cette qualité du Dieu, d’être éternel, a longtemps fait considérer l’Éternité comme inséparable de Dieu. Et ce préjugé est encore ancré en bien des esprits. Aussi, lorsque la philosophie, soutenue de plus en plus par l’expérience scientifique, déclara que l’Univers, en ses éléments constitutifs, était éternel, elle trouva une grande résistance chez les contempteurs même du Déisme.

Aujourd’hui, le mot Éternité est généralement accepté comme exprimant une durée sans commencement ni fin, absolument indépendant du sujet ; et la science moderne admet l’éternité de la matière.


ÉTHER n. m. L’éther est un état de la matière diluée à l’extrême degré accessible à nos moyens d’observations.

Après l’état solide, l’état liquide, l’état gazeux, l’état radiant, tous d’un ordre de grandeur différent les uns des autres, l’état éthérique se révèle aussi différent de l’état radiant que ce dernier l’est de l’état gazeux.

Les phénomènes dont ces différents états sont le siège ne sont pas comparables entre eux et doivent être étudiés séparément. En particulier les lois qui les régissent sont extrêmement différentes.

Ce que nous savons sur l’éther, c’est que c’est un