Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 2.djvu/123

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
EXA
731

ses exactions. Celui qui commet une exaction est un exacteur et avec raison ce dernier terme est devenu synonyme de collecteur, percepteur.

« Des bergers qui, couverts à peine de lambeaux, gardent des moutons infiniment mieux habillés qu’eux, et qui payent à un exacteur la moitié des gages chétifs qu’ils recouvrent de leurs maîtres » (Voltaire). Les choses ont peu changé depuis Voltaire et les hauts fonctionnaires de l’État ne commettent-ils pas de véritables exactions en faisant retomber sur les miséreux tout le poids des impôts et des taxes, dont le produit sert uniquement à satisfaire les appétits de tous les parasites sociaux ?

Le règne de l’argent donne inévitablement naissance à une foule d’exactions, et c’est pourquoi à notre sens l’exaction n’est pas un abus, mais une action normale, inhérente à une société qui repose sur le capitalisme.

Ce n’est qu’en nous libérant du capitalisme, que nous nous libérerons de tout ce qui en découle et qu’une société égalitaire mettra fin aux multiples exactions dont nous sommes victimes.


EXAMEN n. m. Action d’examiner, de rechercher, d’observer. Se livrer à des investigations. Subir une épreuve : passer un examen ; les examens du brevet ; subir un examen de bachelier-ès-science. Faire son propre examen, c’est-à-dire examiner sincèrement et attentivement sa propre conduite. Dans le langage de l’Église, faire son examen de conscience signifie se préparer à la confession.

En philosophie, le libre examen est la faculté que possède chaque individu de n’accepter comme vérité que ce qu’admet sa raison et son expérience. Faut-il dire que cette faculté est troublée par une quantité de facteurs intérieurs qui empêchent l’individu de contrôler les phénomènes et les faits qui le frappent, de façon raisonnable ? Il en résulte que ce qu’il admet comme vérité n’est souvent qu’une stupéfiante erreur.

À la brutalité de la vie, la faculté d’observation de l’homme se développe cependant et l’examen historique de la vie sociale efface petit à petit toutes les erreurs accumulées à travers les siècles.

L’évolution des sociétés n’est que la résultante de l’examen des divers phénomènes scientifiques, économiques et sociaux, et lorsque le peuple, par l’éducation, arrivera à examiner sainement la place qu’il occupe et celle qu’il devrait occuper, les classes disparaîtront pour donner le jour à une association d’hommes libres dans une société libre.


EXCITATION n. f. (du latin excitatio, même sens). Action d’exciter, d’émouvoir, d’entraîner, d’animer, d’encourager. Excitation à la haine, au mépris ; excitation au courage ; excitation à l’étude ; excitation à la révolte, au pillage ; excitation au vol, au meurtre, etc., etc… L’excitation à la révolte est un crime puni par tous les gouvernements et cela n’a rien de surprenant ; ce qui l’est, c’est de punir pour excitation au vol ou au meurtre les militants révolutionnaires qui propagent leurs idées d’émancipation. Est-ce que l’étalage que la bourgeoisie fait de son luxe n’est pas la première des excitations au pillage ? Est-ce que la guerre n’est pas en soi une excitation au meurtre, au viol et à l’assassinat ? La bourgeoisie n’est-elle pas uniquement responsable de l’excitation qui s’empare périodiquement de l’esprit populaire et qui fait déborder le travailleur des cadres de la légalité ?

Certes l’arbitraire, l’inégalité, la misère, la pauvreté, sont des facteurs d’excitation à la haine, et il est normal que ceux qui ont compris qu’une autre forme de société permettrait à chacun de vivre selon ses besoins et de produire selon ses forces, initient les profanes à leurs

espérances, à leurs rêves d’avenir, et qu’ils les excitent au courage pour lutter contre un monde infect qui n’a que trop duré. De l’excitation populaire naîtra la Révolution et de la Révolution une société harmonique.


EXCLUSION n. f. (du latin exclusio, même signification). Action d’exclure ; de mettre hors. L’exclusion d’un membre d’une association. Réclamer l’exclusion d’un candidat. Exclusion de l’armée. L’exclusion de l’armée est consécutive à une condamnation « infamante ». « Sont exclus de l’armée, mais mis à la disposition des ministres de la guerre ou des colonies, les individus condamnés à une peine afflictive ou infamante, certaines catégories de condamnés en police correctionnelle, les relégués » (Larousse). Si, aux yeux de la bourgeoisie, l’exclusion de l’armée est considérée comme infamante, nous ne partageons pas ce point de vue ; nous savons que les exclus de l’armée ne sont pas toujours des voleurs et des criminels, mais souvent des individus dont les opinions avancées, jugées subversives, les firent considérer comme indésirables sous les drapeaux. Bien plus infamante, à notre avis, est l’exclusion que l’on est obligé de prononcer, dans les organisations d’avant-garde, contre des « camarades » trahissant la cause commune. Il n’y a rien d’étonnant à ce que ce fait se produise. Les organisations révolutionnaires sont la terreur de la bourgeoisie, et cette dernière y glisse de ses agents afin d’être renseignée sur l’activité desdites organisations. L’exclusion de ces agents s’impose sitôt que l’on s’aperçoit de leur présence. L’exclusion des brebis galeuses, loin d’affaiblir un parti ou une organisation, lui donne plus de force et plus de puissance, car il est préférable d’être peu et unis, que d’être nombreux et divisés.


EXCOMMUNICATION n. f. Censure ecclésiastique qui a pour objet de retrancher de la communion et de l’usage des sacrements, les pécheurs et les hérétiques. L’excommunication peut être, dans l’Église catholique, prononcée par l’évêque dans son diocèse, l’abbé dans sa juridiction et par le pape et les conciles généraux dans toute l’Église. Dans la religion protestante, ainsi que dans la religion juive c’est le consistoire qui prononce l’excommunication. De nos jours cet acte a peu d’importance dans les pays occidentaux qui ont été touchés par les progrès de la science et de la philosophie, mais il fut un temps où l’excommunication était une arme terrible entre les mains des princes de l’Église. Il était interdit à tout chrétien d’avoir des rapports et des relations avec un excommunié et à une époque où le préjugé populaire faisait la puissance de la religion, le peuple se gardait d’enfreindre les arrêts de l’Église. Comme bien on pense, ceux que l’Église a de tous temps appelés des pécheurs et des hérétiques étaient généralement des savants qui ne voulaient pas accepter un dogme intangible et cruel ; en les excommuniant on éloignait d’eux le peuple. « Dans le bon vieux temps, dit Billaut, l’excommunication était une arme si terrible qu’on la regardait comme pire que la mort ; ainsi, l’on excommuniait un laïque qui avait tué un ecclésiastique, et l’on punissait de mort l’assassin d’une personne qui n’appartenait pas à l’Église. »


EXIL Quand un individu gêne dans son pays d’origine, l’autorité l’en expulse : le voilà en exil. D’aucuns s’exilent volontairement, soit qu’ils préfèrent voyager que de subir les conséquences de leur insoumission économique ou militaire, soit qu’ils ne se trouvent plus en sécurité dans leur pays (Voir : insoumis).

Théoriquement, il n’y a pas d’exil pour l’anarchiste, comme d’ailleurs pour tout internationaliste conséquent. La patrie, c’est le pays où l’on est bien : mettant à profit ce proverbe il s’expatrie quand c’est nécessaire,