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l’assertion de Newton. Si Newton est un génie ce n’est pas parce qu’il a eu la patience ; il a, au contraire, eu la patience parce qu’il avait du génie.

Il n’est pas donné à tout le monde de poursuivre pendant toute une vie la solution d’un grand problème abstrait.

Le génie est inné : l’enfant l’apporte en naissant, sous l’influence de causes qui nous sont inconnues. L’hérédité, tout en y jouant un rôle, est insuffisante à le produire. D’abord il faudrait que le couple fût génial et non pas seulement un des deux conjoints ; condition en pratique irréalisable.

La plus haute instruction, la meilleure éducation ne sauraient donner du génie à qui n’en a pas. Néanmoins, si l’instruction ne donne pas de génie, elle est la condition indispensable de son développement. C’est ainsi qu’on trouve parfois dans la classe ouvrière des hommes extraordinairement doués qui, parce qu’ils ont eu le malheur d’avoir des parents pauvres, ne produiront jamais rien de grand. Il en est qui refont des découvertes déjà faites depuis des siècles, mais qu’ils ignoraient. Le monde stupide et barbare se moque d’eux et les traite volontiers de toqués ; ils auraient été de grands hommes si la société avait été plus juste.

La société actuelle ne fait rien pour le développement des génies. L’intelligence n’est estimée que de manière secondaire ; ce qui domine tout, c’est l’argent. Pour permettre le développement d’un génie, il faut donc, outre les dons naturels, des circonstances heureuses qui sont seulement le lot d’un petit nombre de privilégiés.

On dit souvent que les obstacles favorisent les génies. C’est une erreur grossière. Il est des génies qui triomphent en dépit des obstacles ; mais on oublie tous ceux qui sont vaincus et que, par suite, on ne peut connaître, car le génie, c’est le succès.

« Le peuple n’aime pas les sages ; il supporte plus difficilement l’aristocratie de la raison que celle de la naissance et de la fortune », a dit justement Renan.

Seul, l’homme de génie qui a conquis la gloire, les honneurs et l’argent s’impose au public. Mais encore, à moins que la spécialité de l’homme illustre ne la touche directement, — Pasteur qui guérit la rage, — la masse n’aime pas les supériorités. Lombroso s’est fait l’interprète de cette masse lorsqu’il impute aux hommes de génie tous les méfaits et tous les vices. D’après l’auteur italien, ils sont impérieux, égoïstes, cruels ; les rares femmes de génie avaient de mauvaises mœurs.

Il y a cependant une part de vérité dans ces opinions malveillantes. De même que le pouvoir politique a une influence détestable sur le caractère, le pouvoir moral de l’homme illustre a pour effet de le rendre parfois insupportable dans la vie privée. Grisé par sa popularité, le génie se croit facilement au-dessus de l’humanité et il a une tendance à traiter en esclaves le reste des hommes.

Tout en admirant les hommes de génie qui sont le ferment du progrès humain, il ne faut pas les adorer sans réserves.

D’abord il ne faut pas oublier que l’homme universellement génial n’existe pas. La plupart des grands hommes ne sont que de grands spécialistes. Pasteur, génial en bactériologie et en cristallographie, n’avait pu s’affranchir de la religion.

De tels hommes doivent être écoutés avec déférence dans la matière dont ils se sont occupés mais, pour le reste, leur opinion ne saurait prévaloir. Il ne faut pas croire en Dieu parce que Pasteur y croyait.

Dans la société de l’avenir, l’intelligence sera mise à la place occupée aujourd’hui par l’argent. L’instruction, donnée libéralement à tous les enfants, permettra l’éclosion en beaucoup plus grand nombre des hommes et des femmes de génie. — Doctoresse Pelletier.


GENRE n. m. (du grec genos, race). Le genre est le caractère commun que présentent plusieurs espèces. Le genre animal ; le genre végétal ; le genre humain. « La nature, dit Buffon, n’a ni classe, ni genre ; elle ne comprend que des individus ; les genres et les classes sont l’ouvrage de notre esprit. » C’est, en effet, l’esprit humain qui a groupé en classes, en genres, les diverses espèces d’individus ayant entre eux des ressemblances importantes. Le genre, cependant, n’est qu’une idée générale que l’on se fait des différentes espèces ayant des caractères communs, et l’on est obligé de le subdiviser en variétés qui deviennent genre à leur tour. Lorsque nous parlons, par exemple, du genre animal, nous supposons les différentes espèces d’animaux qui peuplent la terre ; mais ces différentes espèces présentent des caractères particuliers, ce qui nous oblige à dire que « le loup est une espèce du genre chien ; que le lion est un animal du genre félin », etc. Grammaticalement, le genre est la propriété que possède un mot pour désigner le sexe réel d’une chose, d’un objet, d’une personne ; le genre masculin ; le genre féminin. En français, il n’y a pas de genre neutre. Le mot genre s’emploie aussi comme synonyme d’affectation : « Se donner un genre. » On dit aussi un genre de marchandises pour une sorte de marchandises. Marchandises en tous genres. Se dit également d’un mode de style, ou d’une spécialité dans les arts : « Le genre épique ; le genre didactique », etc., etc.


GÉOGRAPHIE n. f. (du grec geo, terre, et graphein, décrire). Description de la terre sous tous ses aspects et sous tous ses rapports. La géographie est la science qui à pour objet l’étude et l’enseignement des différentes parties de la terre, tant au point de vue économique que politique ou historique. On appelle géographie physique la partie de la géographie qui traite de la terre sous le rapport du sol et du climat ; la géographie économique s’occupe de la production du sol et la géographie politique étudie la terre sous le rapport des races, des langues, des pays, etc. Quant à la géographie mathématique, elle décrit la place qu’occupe le globe relativement aux autres planètes.

La géographie serait donc une des sciences les plus complètes, puisqu’elle étudie, fouille, cherche tous les phénomènes de la vie et se propose, non seulement de les décrire, mais aussi, par extension, de rendre habitable notre planète par les victoires consécutives de l’homme sur la nature.

« La géographie, dit Lachâtre, est la science descriptive de la terre. Cette définition explique à la fois quelle est l’étendue et quelles sont les limites du domaine affecté à la géographie. La terre, toute la terre, sans rien omettre de tout ce qui lui appartient : sa figure et sa grandeur ; les lois qui la meuvent dans l’espace et dans le temps ; la disposition relative des formes variées et la nature diverse des éléments qui la constituent ; les phénomènes constants, périodiques ou accidentels de son existence ; la distinction des êtres organisés, adhérents ou mobiles qui la couvrent et se la partagent ; enfin sa possession par l’homme, avec les démarcations multiples dont il l’a empreinte, suivant les caractères physiques et moraux, les langages, les croyances religieuses, les coutumes traditionnelles, les nationalités politiques des populations sans nombre répandues à sa surface, et tout cela dans le présent et dans le passé. Voilà quel est le domaine de la géographie. »

Ce domaine est immense comme on voit, et l’on comprend que l’étude de la géographie soit nécessaire, voire indispensable à la connaissance de la vie. Car la vie ne se manifeste pas seulement sur le petit coin du globe où nous sommes nés ; de l’autre côté des monts et des océans, des hommes luttent aussi pour leur existence, pour arracher au sol, à la nature ce qu’il leur faut pour