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se vêtir, pour se nourrir et pour se loger. Or, s’il est vrai que l’harmonie ne peut naître que de la solidarité entre les humains, il faut connaître ces frères qui ne sont éloignés de nous que par la distance. C’est la géographie historique et politique du monde qui nous permet de nous rapprocher de nos semblables qui, vivant en d’autres contrées, soumis à des phénomènes atmosphériques différents, peuvent avoir d’autres mœurs, d’autres caractères, mais n’en sont pas moins des hommes qu’il faut étudier pour les faire bénéficier de nos connaissances et de nos progrès et profiter des leurs.

N’est-ce pas en parcourant le monde, attiré par ses travaux géographiques, que Kropotkine est devenu anarchiste ? Il suffit de lire son admirable ouvrage sur L’Entr’aide et son autobiographie Autour d’une vie, pour s’en convaincre. Et encore, dans son dernier ouvrage, L’Éthique, on aperçoit que c’est à la connaissance des hommes et des animaux qui peuplent la terre qu’il doit cette clairvoyance et cette haute philosophie humaine qui se dégagent de ses travaux. Il en est de même en ce qui concerne notre grand Élisée Reclus, que la bourgeoisie accapare maintenant qu’il est mort, cependant qu’elle le contraignit à mener une existence d’exilé. Pour nous, anarchistes, Reclus n’est pas seulement grand par ses travaux sur la philosophie anarchiste et sur la Révolution, mais surtout par le monument de connaissances qu’il a emmagasinées dans la Géographie Universelle et dans L’Homme et la Terre qui sont, à nos yeux, de véritables productions révolutionnaires, si l’on considère que la connaissance de la terre et de ses habitants est un facteur d’évolution et de transformation sociale.

Il est regrettable que la géographie que l’on apprend dans les écoles primaires ne soit que de la géographie physique nationale et qu’on tienne les enfants presque ignorants de ce qui se passe chez nos voisins, ou dans les pays et régions assez éloignés. Mais la bourgeoisie, qui préside à l’instruction et à l’éducation de nos enfants, n’a-t-elle pas intérêt à faire ressortir les qualités de son pays, pour faire naître, dans l’esprit des petits, un nationalisme petit et mesquin ? Dans la mesure du possible, essayons de donner à nos petits les connaissances que leur refuse la bourgeoisie ; apprenons-leur la géographie ; faisons-les, par les livres, voyager à travers le monde, pour leur enseigner l’amour du prochain et en faire des hommes.


GÉOMÉTRIE n. f. (du grec géo, terre, et metron, mesure). La géométrie est la science qui a pour objet l’étude de la ligne, de la surface et du volume, c’est-à-dire l’étendue considérée sous tous ses aspects. Il y a plusieurs branches de géométrie ; d’abord la géométrie élémentaire, qui comprend la géométrie plane, et la géométrie dans l’espace, traitant des propriétés du cylindre, du cône et de la sphère. Dans un ordre plus élevé, nous avons la géométrie analytique, la géométrie infinitésimale, etc., etc.

La géométrie est la plus ancienne des sciences et a probablement pour origine l’observation des choses et des objets qui nous entourent. L’application de la géométrie est indispensable dans quantité de travaux et c’est pourquoi cette science est si répandue. Un architecte est un grand géomètre et l’architecture une application de la géométrie. C’est encore la géométrie qui vient à notre secours lorsqu’il faut arpenter un terrain et en fixer la figure sur le papier. Bref, nous avons recours à la géométrie à tout instant de la vie, lorsque nous voulons concevoir les volumes, les surfaces ou les lignes en dehors des corps auxquels ils appartiennent. C’est ce qui explique le nombre immense de géomètres dans le passé et dans le présent. Citons, dans l’antiquité : Archimède ; plus près de nous : Pascal, Liebnitz

et Newton ; d’Alembert au xviiie siècle et, presque nos contemporains : Biot, Cauchy et Arago, qui se signalèrent par leurs études et leurs découvertes géométriques.


GÉRANCE n. f. (du latin gerere, faire, porter). Fonction de celui qui gère, qui dirige, qui conduit. Obtenir une gérance ; avoir la gérance d’un magasin, d’une entreprise industrielle, d’une coopérative ; la gérance d’un journal. Le gérant est un employé, un fonctionnaire, dirigeant une entreprise, une affaire, qui ne lui appartient pas en propre, pour le compte du ou des propriétaires. Commercialement il n’est pas responsable devant la loi et ne doit des comptes qu’aux propriétaires de l’affaire qu’il dirige. Il n’en est pas de même en ce qui concerne la gérance d’un journal, où le gérant est légalement le propriétaire et le premier responsable devant la loi.

En France, pour avoir droit et qualité pour remplir les fonctions de gérant dans un organe de presse, il faut être Français et jouir de ses droits civils. La demande d’autorisation de gérance doit être faite sur papier timbré et remise au bureau de la presse, à la préfecture de police.

Il va sans dire que la gérance des organes révolutionnaires et plus particulièrement des organes libertaires, est confiée à des camarades susceptibles de prendre les responsabilités inhérentes à la fonction et de revendiquer l’attitude du journal, lorsqu’ils ont à comparaître devant les tribunaux. La gérance d’un journal anarchiste n’est pas longtemps exercée par le même camarade, la bourgeoisie les emprisonnant les uns après les autres, et une gérance ne pouvant légalement être assumée par un prisonnier.


GERMINAL n. m. Dans le calendrier républicain, Germinal était le septième mois de l’année.

« Le peuple, a dit Michelet, se souviendra de la Convention, de la grande assemblée humaine, bienfaisante, de celle qui entreprit d’ouvrir l’ère de fraternité, de celle qui, d’un si grand cœur, prodigua son sang pour le droit. » Michelet peut ainsi juger de la Convention ; mais nous, malgré le recul de l’Histoire, tout en reconnaissant les bienfaits qu’elle eut en certains instants le désir d’accomplir, nous ne pouvons pas oublier que, par les erreurs de Robespierre, de Saint-Just et de leurs amis, c’est au sein de la Convention que se trama la terrible journée du 9 Thermidor, si funeste à la Révolution. La réaction thermidorienne était une provocation au peuple, et celui-ci, qui avait applaudi à l’exécution de Robespierre, s’aperçut bien vite que la fin du dictateur profitait surtout à la bourgeoisie qui l’avait préparée. Et le peuple des faubourgs se souleva. La journée du 12 Germinal, An III (1er avril 1795), fut sanglante. Le peuple fut vaincu. Mais, aujourd’hui, il se souvient encore des luttes et du sacrifice de ses aînés, et le mot « Germinal » symbolise pour lui toutes les espérances qu’il met en la Révolution libératrice, qui l’arrachera à l’esclavage imposé par ses maîtres et ses tyrans. Il nous faudra sans doute subir encore bien des journées terribles, mais nous vaincrons un jour parce que nous avons pour nous le droit et la raison, et aussi la force, et « Germinal » sera alors l’aube d’un printemps qui nous remplira de bonheur et de liberté.


GHETTO n. m. (d’origine italienne). Le ghetto est le quartier de Rome que le pape Pie VI, à la fin du xvie siècle, assigna aux Juifs habitant la ville, avec interdiction pour eux d’en sortir la nuit, sous peine de mort.

Écrire l’histoire des ghettos ce serait écrire l’histoire lamentable du peuple juif, depuis le triomphe du christianisme jusqu’à nos jours. Nous nous bornerons, ici, à