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battre, profondément convaincus que, tant qu’il y aura un maître, l’harmonie sociale ne peut exister.

C’est parce que le peuple ne sait pas distinguer ses véritables ennemis qu’il est malheureux ; et lorsqu’il lui arrive de reconnaître ses erreurs, de voir clair dans le jeu de ses faux amis, alors, indulgent, il pardonne. C’est ainsi que vont les sociétés.

Le mot ennemi sert également à désigner celui qui a de l’antipathie pour une chose quelconque. Etre l’ennemi du bon sens ; être ennemi du travail ; un ennemi du socialisme ; un ennemi de l’autorité. Se dit aussi des choses qui sont opposées : l’eau est l’ennemie du feu.

S’emploie aussi comme adjectif. Des armées ennemies. Des peuples ennemis. Ces gouvernements faibles, peureux, ennemis de toute publicité. — (P.-L. Courier.)


ENQUÊTE n. f. (du mot enquérir). Recherches, études, réunion de témoignages destinés à élucider une question douteuse. Faire une enquête ; ouvrir une enquête ; une enquête parlementaire ; une enquête judiciaire ; une enquête administrative ; une enquête commerciale.

Quel que soit le caractère de l’enquête poursuivie, les informations utiles doivent être prises à une source certaine ; ce n’est pas ce qui se produit d’ordinaire, en ce qui concerne les enquêtes officielles. Ces dernières n’ont du reste généralement d’autre utilité que de donner au peuple une satisfaction illusoire ; elles aboutissent toujours à un fiasco.

Par exemple, à diverses reprises, en raison de la vie chère, les gouvernements qui se sont succédé ont nommé des commissions chargées d’enquêter sur les causes de l’augmentation du prix des produits. Aucune de ces commissions n’a obtenu de résultats. Faut-il en être surpris ? Non pas, puisque les enquêteurs officiels appartenaient à la catégorie d’individus directement responsables de la vie chère. Une enquête impartiale et sérieuse arriverait facilement à découvrir le repaire où se cachent les coupables. C’est ce que l’on ne veut pas. Il en est ainsi de toutes les enquêtes gouvernementales, quel que soit leur objet.

N’attendons donc rien des enquêtes officielles. Dans la mesure de nos possibilités, enquêtons nous-mêmes sur tous les objets ou sujets qui nous paraissent obscurs ; tirons les conclusions logiques de nos découvertes, et les résultats obtenus ne tarderont pas à produire les plus heureux effets.


ENRÉGIMENTER verbe. Militairement : action d’incorporer dans un régiment, de former un régiment. Enrégimenter les jeunes recrues. En France, et dans de nombreux pays où le service militaire est obligatoire, on enrégimente de force les jeunes gens ayant atteint un certain âge. C’est ce qu’on appelle le régime de l’égalité militaire. En réalité, celui qui possède la richesse ne souffre nullement de l’enrégimentation, car tout s’achète avec de l’argent et la liberté s’acquiert facilement avec la fortune. Ce n’est donc que le pauvre qui souffre péniblement de l’enrégimentation.

Etre enrégimenté, c’est perdre toute personnalité et agir comme un automate, comme une machine dépourvue de pensée. Rien de surprenant à ce que la bourgeoisie enrégimente une partie de la population et la dirige à son gré et selon ses désirs, ses besoins et ses intérêts. Malheureusement, l’enrégimentation semble sortir des cadres du militarisme et déteindre sur les organisations civiles. C’est ainsi que nous voyons, sous le fallacieux prétexte de discipline dans la lutte sociale, des partis « d’avant-garde » enrégimenter les pauvres bougres ignorants du rôle qu’on leur fait jouer et qui

servent de tremplin politique ou électoral à une poignée d’ambitieux et d’arrivistes,

Il ne faut pas confondre la discipline et l’enrégimentation ; ce sont deux choses bien différentes. Les anarchistes ne sont nullement les adversaires de la discipline, quoi qu’en pensent et quoi qu’en disent nos ennemis. S’ils luttent avec acharnement contre l’enrégimentation, c’est qu’un homme enrégimenté, dans un parti ou dans une armée, est contraint de suivre aveuglément toutes les directives qui lui sont, non pas suggérées, mais imposées par des chefs dont on ne discute pas les ordres.

On nous reproche, particulièrement, depuis la Révolution russe de 1917, de mener le combat contre les organisations communistes et contre la Troisième Internationale. C’est que la plupart des adhérents à l’Internationale de Moscou sont des êtres enrégimentés. Il suffit, pour s’en rendre compte, de suivre le mouvement et l’évolution des partis communistes internationaux.

La politique du gouvernement russe a changé à maintes reprises entre 1917 et 1926, et les dirigeants des P. C. ont évolué en différents sens. Mais le troupeau continue à accepter les variations de la politique et à se courber devant les chefs qui se succèdent.

Lénine, Trotski, Zinoviev, Staline, furent tour à tour chefs de cette armée de parias qui espèrent conquérir leur émancipation en s’enrégimentant. C’est là une erreur profonde ; l’émancipation ne découle pas d’une discipline aveugle et ridicule, mais de la liberté, et le « régiment » civil et militaire n’a jamais été que le repaire des serfs et des esclaves.

La discipline en pleine liberté, acceptée par des hommes conscients ? Oui ; l’enrégimentation ? Jamais, car elle est un facteur de régression sociale.


ENSEIGNEMENT n. m. Profession de celui qui enseigne ; qui donne l’instruction.

On distingue trois ordres d’enseignement : l’enseignement primaire, l’enseignement secondaire et l’enseignement supérieur.

L’enseignement primaire est régi par la loi de 1882 qui a fait la laïcisation. Obligatoire pour les enfants de six à treize ans, il est couronné par le certificat d’études primaires.

Il comporte la lecture, l’écriture, l’arithmétique, l’histoire, la géographie, les éléments des sciences physiques et naturelles, l’instruction civique, etc…

Il est destiné aux enfants des ouvriers et des paysans dont il a pour mission de former des hommes et des femmes bornés, résignés à la condition sociale inférieure qui devra être la leur.

La laïcisation a été un progrès ; l’enseignement de l’instituteur est moins déprimant que l’enseignement du congréganiste, instrument passif d’une Eglise asservie tout entière au capital.

Néanmoins, la culture dispensée aux enfants prolétaires par la République bourgeoise a, elle aussi, pour but de les contenir et de les empêcher de se révolter contre une condition d’esclave.

L’histoire présente aux écoliers les temps passés comme une suite de guerres. Seuls, les rois et leurs serviteurs immédiats sont dignes d’intérêt. Rien de la vie des peuples.

L’instruction civique, mélange de morale et de sociologie simplistes, donne à l’élève une conception fausse de la Société où il devra vivre. Elle lui fait adorer la patrie et les généraux. On présente à l’élève les apparences des choses et il croit que tout est parfait dans la Société présente. Pensant que la richesse est la récompense du travail et de l’économie, il met des sous dans sa tirelire.