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Page:Faure - Encyclopédie anarchiste, tome 3.djvu/320

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MOR
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les causes de la peur les unes sont externes : obscurité ; animaux ; hommes ; impression fortes (scènes de famille, etc.) ; imagination surexcitée (récits et lecture) ; souvenirs de souffrances éprouvées, de peurs antérieures ; sollicitude excessive des parents. D’autres causes sont internes et résultent d’un état maladif (faiblesse générale), des prédispositions héréditaires, d’une trop grande suggestibilité (la peur est extrêmement contagieuse). Remèdes : Faire disparaître les causes ; agir sur le physique en fortifiant l’individu — mais en évitant les abus alimentaires du soir, causes de bien des terreurs nocturnes ; rechercher l’origine des habitudes de peur, puis raisonner l’enfant à leur sujet, procéder avec patience et sans brusquerie, utiliser la suggestion.

La vraie timidité est cependant distincte de la peur ; elle résulte le plus souvent d’une éducation trop sévère et despotique ; elle est aggravée par la conscience d’une infériorité (bègues), la tendance à s’analyser et la débilité. On la traite par un régime fortifiant et une éducation affectueuse, encourageante. Alors que la timidité est surtout un défaut d’adolescent, la bouderie est fréquente au cours du jeune âge. « Au cours de la bouderie, l’enfant ne peut changer d’attitude ou obéir : rien ne peut brusquement modifier son état émotionnel. Abstenez-vous et ne raisonnez pas. Discutez dans quelques heures ou demain. N’essayez pas de combattre son émotion, car vous l’amènerez souvent à commettre des actes graves pour lesquels il est irresponsable et à propos desquels vous ne pourrez intervenir qu’avec injustice… Observons et intervenons après la crise. » (Demoor et Jonckheere.)

Tristesse. — Les causes de la tristesse sont à peu près les mêmes que celles de la paresse et de la peur, partant, les remèdes sont également analogues.

Colère. Esprit de révolte. Brutalité. Cruauté. — Peuvent être le plus souvent considérées comme des réactions de défense active et d’attaque.

Causes de la colère. — La colère a des causes très variées et parfois opposées ; ses causes externes peuvent être : des contrariétés provenant de réprimandes, punitions (voir ce mot), etc. ; des blessures d’amour-propre ; la jalousie ; des injustices ; les exemples du milieu ; l’excès de faiblesse ou l’excès de sévérité ; un temps orageux, etc., etc. ; les causes internes résultent soit de tempéraments faibles, mais très nerveux et facilement irritables, soit d’un excès de vigueur et de tares héréditaires (alcooliques, etc.).

Remèdes à la colère. — Dans tous les cas, il faut opposer à la colère de l’enfant la douceur, la patience et la fermeté. Il faut éviter tous les motifs de crise, et lorsqu’une crise éclate la limiter autant que possible : s’il se peut ne pas punir et dans le cas contraire ne jamais menacer d’une punition qui ne pourra être appliquée. Eviter les punitions corporelles et la répression au cours de l’accès. Rechercher les causes de la colère pour y adapter les remèdes, par exemple traiter la colère du débile nerveux par une hygiène alimentaire convenable, un emploi du temps bien régulier, des fortifiants musculaires et, au contraire, pour les enfants vigoureux en excès, atténuer cette vigueur par une alimentation surtout végétarienne, lui permettre de se dépenser dans des exercices physiques et des jeux, employer des calmants nerveux (bromure de potassium, etc., etc.)

L’esprit de révolte est le plus souvent une colère légitime de l’enfant contre des éducateurs maladroits ou trop sévères ou injustes… La cruauté de l’enfant est causée le plus souvent, par un défaut de développement intellectuel et affectif, l’enfant est alors cruel par ignorance. Elle peut aussi résulter de la peur, de la colère, de l’exemple.

Il est d’autres défauts, mais ceux que nous venons de citer sont, avec la désobéissance, le mensonge, la

jalousie, dont nous avons déjà parlé (X) — voir aussi études correspondantes, — les plus fréquents et les plus graves.

XV. Les défauts des parents. — Notre étude des défauts des enfants nous a permis de montrer que ces défauts résultent fort souvent d’une mauvaise éducation, c’est-à-dire des défauts des parents.

Beaucoup d’erreurs éducatives résultent de l’égoïsme des parents éducateurs et de leur sentiment de l’autorité. Certes, il faut que les petits enfants obéissent, mais il faut aussi que ce soit dans leur propre intérêt et il est nécessaire également que les parents, tenant compte de l’évolution de leurs rejetons les préparent peu à peu à l’indépendance, il faut qu’ils abdiquent peu à peu leur tutelle et développent l’aptitude de l’enfant à se conduire seul.

Même lorsque les parents doivent obtenir l’obéissance ils usent trop souvent de moyens qu’ils devraient éviter : punitions et récompenses, menaces et promesses, crises de colère et de tendresse, ordres et sermons sont des choses également néfastes comme aussi la contradiction des deux époux, mais quelle qu’en soit la cause, l’enfant sait fort bien en tirer parti au grand dommage de son éducation.

Il faut d’abord que les parents pensent que leurs enfants ne sont pas leur propriété et qu’ils veuillent peu à peu les aider à devenir des individus libres. Mais l’éducation est une œuvre de confiance et les parents trop souvent encore perdent la confiance de leurs enfants par des maladresses dont voici les plus fréquentes : écarter les enfants de la conversation des grandes personnes ; ne pas répondre intelligemment aux questions intelligentes des enfants ou y répondre sans souci de la vérité et sans penser que l’enfant s’il découvre la tromperie perdra confiance en qui l’a trompé ; railler les enfants ou les traiter avec dédain pour leurs remarques ou leurs questions naïves, l’enfant sent que l’adulte veut s’élever en l’abaissant et cherche ailleurs un confident ; être trop sermonneurs, trop critiques ; être d’humeur variable : tolérant aujourd’hui ce qu’on punira demain, etc.

Troisième défaut, non moins important que les deux précédents : on prêche en parole, mais pas par l’exemple.

Enfin, si les parents sont généralement, pleins de bonne volonté, s’ils aiment leurs enfants ils ignorent trop souvent comment ils devraient remplir leur rôle d’éducateurs et, le pis, c’est qu’ils ignorent leur propre ignorance ; ils supposent que pour bien élever leurs enfants beaucoup d’amour et un peu de logique suffisent. Or, cela ne suffit pas toujours. Les parents ont le défaut de ne point consulter assez souvent ceux qui pourraient utilement les conseiller : médecins, psychologues et pédagogues.

XVI. Les défauts de l’École. — L’École devrait, s’efforcer de donner une éducation et une instruction qui assurent à chaque individu un développement convenable. — Nous renvoyons aux mots : école, éducation, enfant, instruction, liberté, etc. pour de plus amples explications sur notre conception de ce rôle de l’École. Elle devrait aussi s’efforcer de préparer les enfants qui lui sont confiés à la vie sociale. En résumé, son rôle est double ; 1° elle doit éduquer et instruire chaque individu de façon que chacun puisse développer harmonieusement sa personnalité ; 2° elle doit développer chez tous l’aptitude à la vie sociale.

Si nous tenons compte de ce double rôle nous pouvons faire à l’École actuelle les reproches suivants :

1° L’École n’accorde pas une importance suffisante aux besoins, aux tendances, aux intérêts des enfants et de chaque enfant en particulier. Il faudrait, pour cela, que les éducateurs : a) apprennent à mieux connaître chacun de leurs enfants, b) fassent place à des